Morgan Bourven
Jeux vidéoActivision a le ban facile
De nombreux joueurs se plaignent d’avoir été bannis sans raison de jeux vidéo en ligne, dont ceux de l’éditeur Activision et de sa célèbre franchise Call of Duty. Le blocage de leur compte entraîne la perte des sommes investies, qui peuvent parfois atteindre des milliers d'euros. Une enquête vient d'être ouverte suite à l'action menée par l'UFC-Que Choisir de Nancy depuis plusieurs années.
Pascal, Brayan, Océane, Rémi, Andréa et Antoine sont fans de Call of Duty, la série de jeux vidéo de tir la plus vendue au monde, mais ne peuvent pas se retrouver en ligne pour s’affronter. Pourquoi ? L’accès à leur compte a été purement et simplement bloqué par l’éditeur du jeu, Activision. Sans raison, protestent ces joueurs. Et ce alors qu’ils ont souvent dépensé, au cours de leurs parties, des centaines, voire des milliers d’euros en achats divers (armes, costumes pour leur personnage, etc.).
Rémi, de Maxéville (Meurthe-et-Moselle), est le premier à se rapprocher de l’UFC-Que Choisir de Nancy, en octobre 2020, après avoir été banni de Call of Duty: Modern Warfare. L’association contacte alors Activision pour demander la levée de cette interdiction ou, au moins, en obtenir les motifs. « De nombreux joueurs mécontents ont affirmé être dans une situation similaire », souligne-t-elle dans son courrier. L’éditeur répond en accusant le joueur d’avoir utilisé un logiciel de triche, mais sans en apporter la preuve, et en refusant de revenir sur sa décision.
L’UFC-Que Choisir de Nancy sollicite donc la Direction départementale de protection des populations (DDPP) des Hauts-de-Seine (département du siège d’Activision), qui remarque rapidement que « des conditions d’utilisation [du jeu] et certaines mentions du contrat sont abusives ». Ciblées : les dispositions réservant le droit à la société de résilier l’engagement sans préavis. Forte de cette analyse, l’association relance une nouvelle fois Activision, qui finit par rétablir le compte de Rémi, avant d’affirmer avoir « pleinement pris en compte les observations » de la DDPP et travailler à « adapter les clauses visées ».
Plusieurs jeux concernés
Or ces promesses ne sont pas suivies d’effet. En 2021, un autre joueur, Jean-Charles, est banni puis réadmis par Activision après l’envoi par l’association nancéienne de plusieurs courriers. Cette dernière est, depuis, submergée de plaintes concernant des bannissements abusifs sur les jeux Call of Duty, mais aussi Destiny 2 (de l’éditeur Bungie), Dead by Daylight (Behaviour Interactive), Chevalier du Dragon et Les Hommes de l’ombre (Opogame), etc.
Preuve de l’ampleur du problème, l’article d’alerte rédigé par l’UFC-Que Choisir de Nancy est le plus lu de son site Internet ! De son côté, Activision n’a apporté aucune modification aux conditions d’utilisation de ses jeux en 3 ans, et a même cessé de répondre aux sollicitations de l’association locale. Face à ce mutisme, celle-ci a de nouveau saisi la DDPP en dénonçant « la résiliation du contrat sans préavis, en méconnaissance de l’article R. 212-2 du Code de la consommation ; l’absence de preuve rapportée par la société, en méconnaissance de l’article R. 212-1 du code précité ; l’absence de service de médiation, en méconnaissance de l’article L. 612-1 du code précité ».
Cette alerte a retenu l’attention de la DDPP, qui a indiqué début juillet 2023 qu’une enquête sur les pratiques d’Activision a été lancée. En outre, l’UFC-Que Choisir de Nancy a rencontré un avocat afin qu’une plainte puisse être déposée en son nom et en celui de ses adhérents victimes, car les joueurs concernés par ce type de litiges, souvent jeunes, ne doivent pas être laissés pour compte.
La victoire de l’UFC-Que Choisir contre Nintendo à propos des manettes Joy-Con dysfonctionnelles de la Switch montre bien que dans la bataille contre les éditeurs, il est utile de nous avoir dans l’équipe !