Élisabeth Chesnais
Irrigation agricoleObligation de préserver le débit minimum des rivières
Le jugement du tribunal administratif de Montpellier impose de respecter le débit minimal biologique de la Têt, le fleuve qui traverse le département des Pyrénées-Orientales et alimente les deux tiers de ses surfaces agricoles irriguées. Un rappel salutaire de la réglementation qui fait des vagues.
L’association France nature environnement de Languedoc-Roussillon a vu rouge en 2017 quand le préfet des Pyrénées-Orientales a abaissé, à la demande des agriculteurs irrigants, le débit minimal de la Têt à respecter l’été en période d’étiage à seulement 600 litres/seconde. En accordant cette dérogation, le représentant de l’État contrevenait aux études que l'Agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse et ses propres services avaient menées et à leurs conclusions !
Dès 2010, le bassin versant de la Têt est déclaré en « déséquilibre quantitatif », les prélèvements d’eau étant trop importants pour garantir le bon fonctionnement des milieux aquatiques.
Situation préoccupante de déséquilibre structurel
Les prises d’eau des canaux d’irrigation qui alimentent en goutte à goutte les vergers et les cultures maraîchères ne prélevant que dans le fleuve, le préfet pilote une étude qui définit les débits minimums. Elle identifie un tronçon de 7 km sur le Têt « en situation préoccupante de déséquilibre structurel ». Le débit minimum y est donc fixé à 1 500 litres minimum par seconde. Or c’est précisément sur cette portion que le préfet l’a ensuite descendu à 609 litres/seconde du 1er juillet au 31 octobre chaque année.
L’association n’étant pas parvenue à le convaincre de revenir sur cette dérogation qu’elle estimait illégale, elle engage un recours auprès du tribunal administratif. Avec raison puisque le jugement impose un débit minimal biologique supérieur à 1 500 litres par seconde et supprime la modulation estivale autorisée par le préfet à compter du 1er avril 2023. Il s’appuie sur le Code de l’environnement, qui exige « un débit minimal garantissant en permanence la vie, la circulation et la reproduction des espèces vivant dans les eaux ».
La profession agricole, évidemment vent debout contre cette décision judiciaire, a sorti les tracteurs pour manifester à Perpignan le 24 janvier dernier. Le préfet a reçu le message, il a fait appel du jugement quelques jours plus tard, le 30 janvier. Affaire à suivre...