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Investissements en hôtellerieLe faux placement miracle

Les investissements dans l'hôtellerie ont le vent en poupe. Mais contrairement à ce que laissent croire des conseillers en patrimoine trop enthousiastes, ils ne sont pas sans risques. Décryptage.

Sur fond de rendement au plancher du côté de l'assurance vie comme des actions (gain nul pour le CAC40 de janvier à mai 2016), comment ne pas se laisser tenter par la perspective d'un rendement annuel de 7 % à capital garanti ? C'est ce que proposent certains conseils en gestion de patrimoine indépendants (CGPI) comme, par exemple, le cabinet Hervé-Dupé, basé près de Nantes. Le produit se nomme Duorente Hôtel California. L'argumentaire en ligne évoque un hôtel situé dans « un des quartiers les plus côté de la Capitale, Les Champs Elysées » (sic), un « montage économique et financier permettant d’offrir une rente nette de 7 % par an pendant 7 ans », renforcée par un « pacte d’associés qui engage solidairement l’exploitant à racheter les parts sociales au bout de 7 ans avec une plus-value ». Bref, « une offre sécurisée à tous les niveaux ».

Duorente est un placement élaboré par une société marseillaise, Maranatha. Contacté, son dirigeant, Olivier Carvin, tient un discours diamétralement opposé à celui du cabinet Hervé-Dupé. Il n'est plus du tout question de rente de 7 % par an pendant 7 ans (ce qui ferait plus de 60 % de rendement avec les intérêts annualisés...). Ce chiffre est une simple perspective, sans aucune garantie. Par ailleurs, l'exploitant ne s'engage nullement à racheter les parts sociales au bout de 7 ans. Au contraire, il se réserve le droit de le faire, sans aucune obligation de son côté. C'est l'investisseur particulier qui signe une promesse de vente !

Quant à la sécurité, elle est tout aussi relative. Les particuliers ont des parts dans le fonds de commerce, pas dans les murs (sauf exception). La valeur de ce fonds de commerce peut baisser en fonction de la conjoncture. Les attentats de novembre 2015 ont eu un effet désastreux sur l'hôtellerie parisienne. C'était temporaire. Moins dramatique mais plus lourd de conséquence, les fonds de commerce sont aussi sensibles aux taux d'intérêt. Quand ces derniers montent, la valeur des fonds décroît, et inversement. Or, en ce moment, les taux sont au plus bas. Les fonds de commerce, hôtels compris, sont donc chers et difficiles à valoriser. La conservation du capital est une probabilité raisonnable, pas une certitude. En 2014 déjà, le fonds Turenne Capital mettait en garde contre l'hôtellerie parisienne, où les opportunités lui semblait « rares et trop chères » ! Où en sera le marché dans 7 ans, difficile de le dire, surtout si on prend en compte la concurrence de nouveaux acteurs comme Airbnb.

Un des produits de Maranatha, le placement Finotel, a été visé par l'Autorité des marchés financiers (AMF). La communication institutionnelle de la société est sans ambiguïté : pas de garantie de rendement, pas de garantie de capital. Interrogé par Que Choisir, Olivier Carvin lui-même présente ses produits comme des investissements de diversification qui ne doivent pas capter plus de 15 % du portefeuille d'un particulier.

Sa société tolère néanmoins comme distributeur des CGPI à l'enthousiasme commercial mal canalisé. Une association de conseils en patrimoine, l'Anacofi, a d'ailleurs posé des questions complémentaires à Maranatha, afin d'évaluer en toute clarté le modèle économique de ses placements (le courrier, daté du 25 avril, est en ligne). Une autre association professionnelle, la Compagnie des CGPI, a également fait part de ses interrogations.

Qu'une société présente ses produits sous leur jour le plus favorable n'a rien de bien étonnant. Les distributeurs, en théorie, devraient prévenir les excès. Dans l'univers des placements (et en particuliers des placements atypiques), certains CGPI en rajoutent au contraire, vendant des couples sécurité/rendement imaginaires. Les fonds de commerce dans l'hôtellerie ont dégagé de belles plus-values ces 10 dernières années. De là à les vanter comme des produits sans risque à rendement élevé dans l'avenir, il y a une marche que seuls franchissent les professionnels désinvoltes.

Mise à jour du 22 juin 2016

Le groupe Maranatha vient de confirmer la nomination d’un administrateur judiciaire sur une partie de ses activités. Par ailleurs, le SRPJ (Service régional de police judiciaire) de Marseille a ouvert une enquête préliminaire pour des faits présumés d’escroquerie concernant Maranatha en 2012. En juillet 2015, la brigade financière du SRPJ a diffusé un appel à témoignages concernant la manière dont les produits de Maranatha étaient commercialisés.

Erwan Seznec

Erwan Seznec

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