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InsecticidesPeut-on encore manger des cerises ?

En abattant de magnifiques cerisiers en fleurs face caméra, les producteurs de cerises ont réussi leur coup, les images ont fait le tour de tous les journaux télévisés. On en oublierait presque qu’ils utilisent un insecticide, le diméthoate, dangereux pour la santé. 

En charge de l’évaluation des pesticides, l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) n’a pas interdit le diméthoate par hasard. Cet insecticide connu pour sa toxicité a déjà fait l’objet de nombreux retraits du marché. Les producteurs de cerises restaient quasiment les seuls à pouvoir l’utiliser. Une dérogation justifiée par la nécessité de lutter contre la mouche historique de la cerise et depuis 2010 contre un nouveau venu, le moucheron asiatique drosophila suzukii qui fait des ravages dans les vergers.

Mais le dossier toxicologique du diméthoate est indéfendable, les risques pour la santé humaine sont bien réels, tant pour les utilisateurs que pour les consommateurs. « Il n’est pas possible d’exclure un risque aigu pour les forts consommateurs de cerises, du fait des niveaux de diméthoate détectés dans les cerises », a même conclu l’Anses en 2011.

Deux ans plus tard, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) confirmait le risque pour les aliments traités au diméthoate. Après cet avis, il revenait à chaque État membre de se prononcer. La France vient de décider de protéger la santé des amateurs de cerises en interdisant cet insecticide. Que Choisir s’en réjouit, tout en comprenant le lobbying acharné des professionnels.

Pour un producteur de cerises, le diméthoate a beau être un insecticide dangereux, c’est l’arme magique. Une fois sur les cerises, il ne se contente pas de tuer la mouche, il tue même l’œuf si elle a déjà pondu. La cerise ne sera pas véreuse.

Une alternative : le bio

Si le diméthoate n’a pas d’équivalent, il existe néanmoins d’autres moyens de protéger les cerises sans faire courir de risques aux consommateurs et à l'environnement. Producteur de cerises bio dans le Vaucluse, Jean-François Augier les connaît bien. « On a la solution idéale : c’est couvrir les cerisiers avec un filet. Il est efficace à 100 % car il fait totalement barrière à la mouche de la cerise. Seuls les pucerons peuvent se retrouver sur les fruits et dans ce cas, un lâcher de coccinelles règle le problème. Pour la pose des filets, il faut toutefois planter les arbres en axe. Dans les anciens vergers, formés en gobelet, ce n'est pas facile. Sur mes 3 000 cerisiers, j’en ai 1 000 qui sont équipés. En plus des mouches, les filets protègent des intempéries, cela me permet d'avoisiner zéro perte. Ailleurs, j’utilise les pièges à glu et une matière active autorisée en AB. Mais le résultat est largement moins satisfaisant. »

Ingénieur d’expérimentation au Grab, le groupe de recherche en agriculture biologique, François Warlop confirme : « Le filet est efficace à 100 %, mais pas facile à placer si le verger n’a pas été conçu pour. Quand on met les cerisiers sous tunnel plastique pour avancer la récolte, on peut fermer les entrées avec des filets. On expérimente aussi toute une gamme de produits bio, on n’a pas encore trouvé le produit miracle. Une autre solution, ce sont les variétés précoces comme la Burlat, elles mûrissent avant l’arrivée de la mouche. Le problème majeur aujourd’hui, c’est que la profession n’a jamais cherché d’alternatives au diméthoate en conventionnel. »

Élisabeth Chesnais

Élisabeth Chesnais

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