Olivier Puren
Impôts 2025Prélèvement à la source : ce qui va changer en 2025
Le prélèvement à la source va évoluer à partir du 1er septembre 2025, afin de mieux tenir compte de la disparité de revenus pouvant exister au sein des couples soumis à imposition commune. Les femmes mariées ou pacsées seront les principales bénéficiaires du changement à venir.
La loi de finances pour 2024 votée fin 2023 prévoit d’instaurer des règles d’imposition plus équitables au sein des couples. Objectif : corriger l’injustice fiscale créée par l’imposition commune des contribuables mariés ou pacsés, qui conduit à surtaxer le conjoint le moins fortuné (la femme dans la plupart des couples hétérosexuels) et à sous-taxer le plus fortuné (l’homme la plupart du temps). Une injustice qui n’a pas disparu depuis la mise en place du prélèvement à la source en 2019, car le mode de calcul du taux de prélèvement avantage toujours celui qui gagne le mieux sa vie tandis qu’il pénalise l’autre. Mais les choses vont changer le 1er septembre 2025.
Un impôt à la source inéquitable
Aujourd’hui, les couples mariés ou pacsés sont soumis à l’impôt à la source à un taux calculé à partir de l’ensemble de leurs revenus personnels et communs. C’est le taux de prélèvement de leur foyer fiscal. Ce taux s’applique de plein droit aux revenus respectifs de chaque conjoint (salaires, pensions de retraite, bénéfices professionnels, etc.) et aux revenus communs du foyer (revenus fonciers, rentes viagères à titre onéreux), sauf si l’un d’eux opte pour l’application d’un taux de prélèvement individualisé sur ses revenus personnels. Or, dans les couples aux revenus déséquilibrés, le taux de prélèvement du foyer est forcément différent de celui que supporterait chaque conjoint sur ses revenus personnels s’il était célibataire : il est plus élevé pour celui qui perçoit les revenus les plus faibles et, inversement, plus faible pour celui qui perçoit les revenus les plus élevés.
Exemple : un couple marié dans lequel Jacques perçoit 50 000 € de salaires et Marie 25 000 € est soumis à un taux de prélèvement à la source de 9,1 % sur l’ensemble de ses revenus. Si chacun était imposé distinctement, Jacques serait taxé à 11,8 % sur ses salaires et Marie à 3,7 % sur les siens. Résultat, elle supporte 2 275 € d’impôt à la source par an avec le taux de son foyer alors qu’elle en réglerait 925 € avec son taux personnel. À l’inverse, Jacques ne paye que 4 550 € d’impôt à la source par an alors qu’il en payerait 5 900 € avec son taux personnel.
Un impôt à la source plus juste
Pour corriger ce biais fiscal, la règle sera inversée à partir de septembre 2025, date de la prochaine actualisation du taux de prélèvement à la source. Chaque conjoint sera soumis de plein droit à un taux individualisé sur ses revenus personnels, et le taux du foyer fiscal ne s’appliquera que sur les revenus communs du couple. Les conjoints auront toutefois la possibilité d’opter pour l’application de ce dernier taux à l’ensemble de leurs revenus personnels et communs.
Cette réforme va sensiblement améliorer la situation de la plupart des femmes actives ou à la retraite qui vivent en couple, leur conjoint étant mieux rémunéré ou touchant une meilleure pension dans près de 8 cas sur 10. L’application automatique du taux individualisé réduira les impôts prélevés sur leurs revenus personnels, ce qui leur procurera des gains de trésorerie non négligeables (voir l’exemple proposé plus haut). En revanche, la grande majorité des hommes mariés ou pacsés verront leur taux d’imposition augmenter et ils payeront plus d’impôt à la source. La réforme ne changera rien à la situation des couples monoactifs et des couples biactifs aux revenus équilibrés : ils supporteront le même montant d’impôt à la source après la réforme qu’avant.
L’individualisation du taux de prélèvement des couples mariés ou pacsés existe déjà aujourd’hui, à titre optionnel. Chaque conjoint peut demander à tout moment l’application de ce taux sur ses revenus propres, en se connectant à son espace personnel sur le site des impôts ou de se rendant dans son centre des finances publiques. L’option prend effet sous 1 à 3 mois, et seuls les revenus communs du couple restent soumis au taux du foyer. Dans les faits, cependant, de nombreux contribuables qui auraient intérêt à l’exercer préfèrent y renoncer car l’option de l’un s’impose à l’autre. À partir de septembre 2025, ils n’auront plus à se poser la question : l’imposition individualisée sera automatique, sauf si les conjoints optent conjointement – et non plus de manière individuelle – pour le maintien du taux de leur foyer.
Les limites de l’individualisation
Pour déterminer le taux individualisé propre à chaque conjoint, le fisc retiendra les revenus personnels de chacun ainsi que la moitié des revenus communs et des revenus des personnes à charge du foyer. Il divisera aussi par deux les majorations de quotient familial du couple (pour enfants et autres personnes à charge) et ses charges déductibles (pensions alimentaires, frais d’accueil d’une personne âgée, épargne retraite, etc.).
Ce partage égalitaire ne correspond pas à la réalité de tous les couples, notamment lorsque l’un des conjoints a des enfants nés d’une précédente union, verse une pension alimentaire à ses parents dans le besoin ou est seul propriétaire des biens productifs des revenus communs. Dans ces cas, son taux individualisé ne correspondra pas au taux de prélèvement appliqué à un célibataire disposant de revenus équivalents. Il sera soit plus bas, et son conjoint continuera à payer plus d’impôts qu’il en payerait en tant que célibataire, soit plus élevé, et son conjoint continuera à payer moins d’impôts qu’il ne devrait.
Exemple : Jacques perçoit 50 000 € de salaires et 15 000 € de loyers issus de biens personnels, et son épouse Marie 25 000 € de salaires. À partir de septembre 2025, Jacques sera soumis à un taux de prélèvement individualisé de 14,6 % sur ses salaires, Marie à un taux individualisé de 5,8 % sur les siens, et le taux du foyer de 11,7 % restera applicable sur les loyers du foyer. Mais si chacun était imposé distinctement, Jacques serait taxé à 16,4 % sur ses salaires et ses loyers et Marie à 3,7 % sur ses salaires. Résultat, elle supportera une hausse de son taux individuel d’imposition de 2,1 % et Jacques une baisse du sien de 1,8 % du fait du partage par moitié des loyers du foyer.