Morgan Bourven
Immobilier défiscaliséLa prudence toujours de mise
La société Finance Plus a été placée en redressement judiciaire par le tribunal d’Amiens. Des centaines de particuliers, qui avaient investi dans ses programmes d’immobilier défiscalisé, attendent toujours leur logement.
On croirait presque une société fantôme. Le promoteur Finaxiome ne publie plus ses comptes, son site Internet n’est plus à jour et, au siège social de l’entreprise, le téléphone sonne dans le vide. Une discrétion qui inquiète les investisseurs, alors que la filière de distribution du groupe, Finance Plus, a été placée en redressement judiciaire le 19 avril, sous le nom d’emprunt Seven.
Ce nouvel épisode s’ajoute à la longue liste des déboires de Finaxiome. Et à ceux de centaines de particuliers qui pensaient réduire leurs impôts en investissant dans ses programmes. Finaxiome est en effet spécialisé dans l’immobilier défiscalisé. Le principe est simple : un particulier bénéficie d’une réduction d’impôt importante s’il investit dans la construction d’un logement neuf, à condition de le mettre en location pendant une durée de 9 ans. Mais impossible de louer lorsque le logement n’est pas terminé. Or, dans toute la France, au moins 350 logements de Finaxiome sont inachevés – des chantiers parfois interrompus depuis plusieurs années. Pendant ce temps, les investisseurs payent des intérêts intercalaires, qui ne sont parfois plus remboursés par la société.
Des recours possibles
En règle générale, la remise des clés ne signifie pas forcément la fin de la galère pour les acheteurs. L’avocate Anne-Sophie Ramond, à Paris, s’est plongée dans l’immobilier défiscalisé il y a 3 ans. Depuis, il ne passe pas un jour sans qu’elle ne reçoive l’appel d’un investisseur mécontent. « Dans 90 % des cas, il s’agit de personnes qui n’arrivent pas à louer », précise-t-elle. Beaucoup de promoteurs ont construit dans des villes où la demande locative n’était pas assez forte et avec des loyers supérieurs aux prix du marché. Or, et c’est le piège du dispositif, les promoteurs omettent souvent de préciser à la signature du contrat que, si le logement n’est pas loué pendant 12 mois, la défiscalisation ne tient plus.
Il est néanmoins possible de se tourner vers la justice. En cas de retard trop important de la livraison – les actes notariés prévoient en général un délai de 3 mois – on peut réclamer l’annulation pure et simple de la vente. Concernant les logements inlouables, « plaider le dol fonctionne plutôt bien », explique l’avocate. Il s’agit d’une escroquerie, en droit civil. « On vend un bien en mentant sur le potentiel locatif. Il y a donc un défaut de conseil et d’information », continue-t-elle. Les études réalisées par les conseillers de gestion en patrimoine missionnés par les promoteurs peuvent alors être versées au dossier. Simulations financières fausses, loyers surévalués, emprunts mal négociés : en cas de conseil vicié, la responsabilité du conseiller peut être engagée. En mai 2010, un arrêt de la Cour de cassation a confirmé le versement de dommages et intérêts à des particuliers trompés. Un espoir pour les investisseurs floués, qui doivent néanmoins s’armer de patience : une procédure dure en moyenne 2 ans.
Quatre conseils avant d’investir
L’achat d’un appartement défiscalisé doit se faire avec la même prudence que celui d’une résidence principale. Nos conseils pour éviter les mauvaises surprises.
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Se rendre sur place. Les promoteurs vous vendront toujours un bien situé à 600 km de chez vous. Il faut tout de même s’y rendre et y faire une étude de marché. En moyenne, les logements vendus seraient surévalués de 50 000 €.
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Avant de s’engager, refaire les simulations financières avec un conseiller en gestion du patrimoine qui ne soit pas lié au promoteur.
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Négocier l’emprunt avec sa banque. Les gestionnaires proposent en général un package, avec appartement et prêt bancaire. Des prêts à taux variable, loin d’être avantageux.
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Vérifier l’état du marché. Des villes saturées de logements, des loyers deux fois plus chers que le marché : pour éviter ces écueils, il convient de vérifier par soi-même l’état du marché locatif.