Élisabeth Chesnais
Toujours des dérives
Les dérives de l’homologation des pesticides ne sont pas nouvelles, Que Choisir les dénonçait déjà en 2003. Mais le rapport que l’association Générations futures vient de présenter prouve que la situation reste très problématique.
« Des irrégularités graves ont permis le maintien sur le marché de plus de 40 pesticides dangereux qui devraient être interdits ou avoir des usages restreints », dénonce l’association Générations futures. Le propos n’a rien d’insensé, il se base d’ailleurs sur les avis que l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a transmis à la Direction générale de l’alimentation (DGAL), le service du ministère de l’Agriculture en charge de l’homologation des pesticides, pour chaque demande présentée par un fabricant de produits phytosanitaires.
Il s’avère que la DGAL a rarement tenu compte des remarques faites par l’Anses. Des autorisations de mise sur le marché ont été maintenues malgré les avis défavorables, ou favorables sous conditions restrictives, de l’Agence. D’après le courrier et les tableaux récapitulatifs que l’Anses a envoyés à la DGAL, ces anomalies ont concerné de nombreux pesticides. Des substances et des usages restent autorisés alors qu’ils ne sont pas conformes aux exigences réglementaires.
Lors de l’évaluation des dossiers déposés par les industriels, l’Anses a émis de nombreux avis défavorables en raison de risques inacceptables pour les eaux souterraines, de problèmes de résidus, de manque de données sur l’innocuité, ou encore de risques sanitaires pour l’applicateur. Mais pour de nombreux pesticides, la DGAL n’a pas pour autant modifié ou retiré les autorisations de mise sur le marché.
En novembre 2003, Que Choisir dénonçait déjà les procédures d’évaluation du risque, assurées « par le seul ministère de l’Agriculture en cogestion avec les partenaires industriels » et réclamait que le ministère de l’Agriculture ne soit plus le seul décisionnaire en matière d’homologation des pesticides. Depuis rien n’a changé, cette demande reste d’une actualité brûlante.