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Fruits et légumesLes dessous peu ragoûtants des ventes sauvages

Les ventes au déballage de fruits et légumes se multiplient sur le bord des routes. Face au non-respect de la loi, la prudence est de mise.

Après avoir passé l’hiver dans le sud de la France à vendre des oranges d’Espagne, ils migrent en été vers les zones côtières et touristiques, avec leurs cageots de melons, pastèques, cerises ou pêches. « Ils », ce sont les vendeurs dits « au déballage », qui installent leurs tréteaux sur des parkings ou le bord des routes. Leur nombre a explosé ces dernières années. « Dans l’agglomération de Bergerac, nous nous sommes retrouvés avec 14 vendeurs d’oranges, dénonce Sébastien Héraud, maraîcher en Dordogne. Nous avons suivi leurs camions jusqu’au marché de gros de Mercabarna, à Barcelone. Ils s’approvisionnent en fruits déclassés, destinés à l’agroalimentaire, qu’ils achètent 11 centimes le kilo et revendent 1,20 €. » Francisation de denrées étrangères, absence d’hygiène, dumping social… Les griefs des professionnels sont nombreux, mais rares sont les maraîchers et marchands de primeurs prêts à témoigner : « Certains ont été menacés ou ont vu leur magasin saccagé après s’être exprimés », explique Florian Bèze, animateur de la section fruits et légumes du syndicat Coordination rurale. Il met en avant les risques sanitaires de ces produits, « dont on ne sait dans quelles conditions ils ont été cultivés », vendus sans respecter la chaîne du froid, à hauteur des pots d’échappement et, parfois, posés à même le sol.

La pratique de la vente au déballage est légale, à condition de suivre certaines règles (lire encadré). Mais les contrôles sont trop rares, selon la profession. « À Agen (47), il y a deux vendeurs d’oranges à 600 mètres des bureaux des services de la répression des fraudes, avec des cageots par terre et sans affichage de prix, s’étrangle Sébastien Héraud. Nous ne comprenons pas ce laxisme. Si nous faisions pareil, nous aurions fermé boutique depuis longtemps. » Son activité de vente directe à la ferme, elle, est inspectée tous les ans… Et même lorsqu’il y a contrôle, « les sanctions ne sont pas dissuasives », observe Christel Teyssèdre, marchande de primeurs à Prayssac (46) et présidente de la fédération Saveurs commerce. L’amende encourue, en cas de vente ne respectant pas la durée légale, s’élève à 1 500 €. « Les contrevenants, qui n’acceptent que du cash, paient et continuent comme si de rien n’était », regrette-t-elle.

Tuer le ver dans le fruit

Pour Florian Bèze, l’une des solutions serait « que les contrôles ne portent pas sur les vendeurs mais sur les sociétés qui les approvisionnent ». Très structurées, elles multiplient les implantations et font travailler les vendeurs sous le statut d’auto­entrepreneur, souvent dans des conditions difficiles. « Il s’agit d’un fonctionnement semi-mafieux », alertent les professionnels. Ils ne demandent pas l’interdiction des ventes au déballage mais un redoublement des contrôles de la répression des fraudes et de l’inspection du travail. Fin 2018, lors du débat sur la loi Agriculture et Alimentation, les fédérations ont réclamé le renforcement des pouvoirs des maires, avec un amendement qui leur aurait permis de refuser l’installation des vendeurs au déballage sur leur commune. Il a été rejeté. Et « la loi Alimentation n’a rien changé », déplore Florian Bèze.

Ce que dit la loi

Les ventes au déballage sont soumises à une déclaration préalable à la mairie et à l’Administration, avec les dates de début et de fin. Elles ne peuvent pas durer plus de deux mois par année civile sur un même emplacement ou dans un même arrondissement. Si la surface occupée se trouve sur le domaine public, une demande d’autorisation doit être adressée et une redevance d’occupation, payée.

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