
Élisa Oudin
L’Assemblée nationale vient de voter une proposition de loi déposée le 8 avril 2024 par le sénateur Philippe Folliot. Il s’agit d’imposer aux établissements bancaires de justifier, sur demande du particulier, leur décision de clôturer son compte. Certains motifs de fermeture de compte seront même interdits. Explications.
Peut-être bientôt une bonne nouvelle, dans le secteur bancaire, pour les consommateurs. Une proposition de loi sénatoriale (1), visant à lutter contre les fermetures abusives de comptes bancaires, a été adoptée le 13 mars dernier. Le texte va maintenant repasser en seconde lecture devant le Sénat. La proposition encadre le pouvoir discrétionnaire qu’ont eu jusqu’ici les établissements bancaires de clôturer un compte. La proposition de loi rend illégaux les motifs suivants de fermeture :
Dans tous les cas, l’agence devra fournir par écrit et gratuitement les motifs de la décision de fermeture, dans les 15 jours ouvrés suivant la réception de la demande du client.
Actuellement, hormis le cas du droit au compte, les banques peuvent résilier tout contrat avec un client, sans avoir à fournir le moindre justificatif. Un pouvoir qui contribue encore à déséquilibrer la relation commerciale, déjà largement asymétrique, entre les clients et les établissements bancaires. Que Choisir a déjà plusieurs fois illustré les usages abusifs de ce pouvoir discrétionnaire. De nombreuses banques continuent ainsi à profiter de ce pouvoir unilatéral pour exclure la clientèle la plus fragile, se débarrasser de clients qui n’acceptent pas des modifications contractuelles, ou encore qui refusent de répondre à certains questionnaires très intrusifs. Seule obligation jusqu’ici : un préavis de deux mois, afin de permettre aux particuliers de retrouver une autre banque auprès de laquelle ouvrir un compte. Or les conséquences d’une exclusion bancaire peuvent être très lourdes à supporter, tout particulièrement dans certaines zones rurales, où le réseau bancaire est peu dense.
Pour contester le nouveau dispositif légal, les banques ont opposé l’argument de la lutte contre les opérations frauduleuses. Elles affirment qu’en cas d'opérations suspectes (blanchiment d'argent ou financement du terrorisme) sur un compte qu’elles envisagent de fermer, elles se trouveront dans une situation impossible : motiver ou refuser de motiver la décision. Car la loi prévoit que dans ces cas, les établissements bancaires doivent alerter le service de renseignement financier Tracfin, chargé de la lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme, tout en conservant cette procédure confidentielle. Les parlementaires ont prévu une première réponse : les établissements n’auront, dans ce cas, aucune réponse à apporter.
Mais si leur demande de motivation reste lettre morte, les malfaiteurs pourront en déduire qu’une enquête est en cours contre eux, arguent les banques. Le texte (article 2 de la proposition de loi) adopté par l’Assemblée nationale dispose néanmoins : « Un décret précise(ra) les modalités d’interaction entre les banques et le service chargé du traitement du renseignement et de l’action contre les circuits financiers clandestins. » Ceci afin de permettre d’établir la meilleure façon de ne pas entraîner de soupçons chez les escrocs. Gageons que cela devrait enfin permettre de rassurer les banques.
Lettre type - Fermeture du compte par le banquier
Questionnaire bancaire - Ce que vous risquez si vous n’y répondez pas
Élisa Oudin
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