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Emballages alimentairesLe bisphénol A interdit en Europe

La Commission européenne acte les « effets potentiellement nocifs pour la santé » de cette substance, qui ne pourra plus être utilisée pour les emballages et contenants (comme les ustensiles de cuisson) en contact avec les aliments. Les industriels bénéficient d’une période de transition de 18 mois, mais aussi de dérogations pour des cas limités.

Enfin ! Dix ans après la France, l’Union européenne (UE) proscrit le bisphénol A (BPA) dans les matériaux au contact avec les aliments « en raison de ses effets potentiellement nocifs pour la santé », explique Bruxelles dans un communiqué, le 19 décembre 2024 – la mesure entrera en vigueur 20 jours après sa publication au Journal officiel de l’UE, attendue dans les prochains jours. « L’interdiction signifie que le BPA ne sera pas autorisé dans les produits entrant en contact avec des denrées alimentaires ou des boissons, tels que le revêtement sur des boîtes métalliques, des bouteilles de boissons en plastique réutilisables, des refroidisseurs de distribution d’eau et d’autres ustensiles de cuisine. » Fabricants et utilisateurs bénéficient d’une période de transition de 18 mois, mais des dérogations limitées pourront être accordées pendant 3 ans, quand il n’existe pas d’alternative. Une tolérance contestable, car le BPA étant sur la sellette depuis des années, son interdiction n’est pas une surprise, et les industriels auraient dû être prêts depuis longtemps.

Fin du déni

Pour autant, cette décision est une avancée : elle succède à des décennies de déni quant à la nocivité du BPA, dont l’effet de perturbateur endocrinien sur les systèmes immunitaire et reproducteur est pourtant connu depuis de très nombreuses années. Encore en 2015, l’Agence européenne de sécurité alimentaire (Efsa) assurait que, « aux niveaux actuels d’exposition, le bisphénol A ne présente pas de risques ». Avant de finalement diviser, en 2023, la dose journalière tolérable (la quantité maximale ingérable sans risque), qu’elle avait elle-même établie, par… 20 000 !

La France en avance

Heureusement pour nous, la France, précurseur sur ce sujet, avait pris les devants : elle a interdit le BPA dans les biberons et contenants d’aliments pour bébés dès 2009, et dans tous les conditionnements, contenants et ustensiles alimentaires, ainsi que dans les tickets de métro et tickets de caisse, à partir de 2013. L’UE a suivi avec retard : elle a interdit le BPA seulement en septembre 2018, et uniquement dans les biberons et emballages contenant des aliments pour bébés et pour enfants de moins de trois ans. Aujourd’hui, c’est aussi chose faite pour l’ensemble des emballages.

Une substance interdite mais utilisée

Du moins en théorie : des tests que nous avons menés en 2023 montrent que cette substance est encore présente dans de nombreux objets du quotidien vendus en France, y compris dans des biberons, des canettes de boisson et des boîtes de conserve. De plus, quand les fabricants ont retiré le BPA de leurs plastiques, ils l’ont parfois remplacé par d’autres molécules de la même famille, dont certains sont aussi toxiques, voire davantage. Ainsi, l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) estime que le bisphénol B « présente des propriétés endocriniennes similaires, voire légèrement plus prononcées » que le BPA ; quant au bisphénol S, c’est cette fois l’Agence européenne des produits chimiques (Echa) qui rappelle qu’il « est soupçonné de présenter de nombreux effets toxiques similaires ».

La Commission précise que « l’interdiction inclut également d’autres bisphénols [et leurs dérivés] nocifs pour la reproduction et le système endocrinien », comme le bisphénol S. Néanmoins, on peut regretter que l’UE n’ait pas enclenché une mesure de retrait de la totalité de cette famille de molécules, au bas mot au nombre de 148 ! En effet, ne sont concernées par cette mesure que les substances déjà officiellement identifiées comme dangereuses (perturbateur endocrinien, mutagène, cancérogène ou reprotoxique). Or, on sait que les secteurs industriels sous le coup de menaces d’interdiction font tout pour la retarder, à grand renfort de lobbying et de manœuvres dilatoires, comme nous le révélions dans notre enquête.

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