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ÉlectricitéLes options heures creuses et Tempo d’EDF valent-elles encore le coup ?

Ces deux options du tarif réglementé d’électricité ont pour point commun d’inciter les particuliers, par des prix du kWh attractifs, à décaler le maximum de leurs consommations d’électricité au moment où le réseau est le moins en tension. La nouvelle grille tarifaire, entrée en vigueur le 1er février, a écorné leur compétitivité. À quel point ?

C’est l’une des mauvaises nouvelles de ce début d’année. Malgré la détente des prix de l’électricité sur le marché de gros ces derniers mois après la flambée historique de 2022, le prix du kWh augmente. En cause : le grand retour de l’accise de l’électricité (ex-TICFE). En 2021, en pleine envolée des prix de l’électricité, cette taxe était passée de 32 € le MWh à 1 € pour les particuliers. Mais puisque le marché s’est assagi, le gouvernement a annoncé dès fin 2023 sa volonté de récupérer une partie de ce manque à gagner. « Pour 97 % des ménages français, l’augmentation sera sous les 10 % », promettait Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, au JT de TF1 le 21 janvier.

Au 1er février, cette taxe est ainsi passée à 21 € le MWh, augmentant de facto les factures d’électricité. EDF a mis à jour la grille tarifaire de ses offres au tarif réglementé. Le fameux Tarif bleu, dont le prix est fixé par les pouvoirs publics sur proposition de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) et qui sert de point de repère pour comparer les offres des autres fournisseurs.

Des options plus perdantes que d’autres

En option de base, dans laquelle le prix du kWh ne varie jamais, il passe de 22,76 cts d’euro à 25,16 cts. En option heures pleines/heures creuses (HP/HC), les prix grimpent de 24,60 cts d’euro à 27 cts pour les heures pleines et de 18,28 cts d’euro à 20,68 cts pour les heures creuses. Si on ne se focalise que sur les prix bruts du kWh (1), les hausses paraissent plus importantes que celles annoncées par Bruno Le Maire… « Les fourchettes données par le ministre de l’Économie portaient sur l’ensemble de la facture d’électricité, rappelle-t-on à EDF. D’autres composantes rentrent alors dans le calcul. Le tarif de l’abonnement, la puissance souscrite, la consommation annuelle du ménage... »

L’énergéticien assure que les nouveaux tarifs correspondent bien aux hausses annoncées par Bruno Le Maire. Pour les clients résidentiels au Tarif bleu, toutes options confondues, l’augmentation moyenne de la facture est de 9,5 % TTC. Soit une hausse moyenne de 113 € TTC par an. « Puisque l’accise est un montant fixe appliqué uniformément aux tarifs, plus ces derniers étaient bas et plus la hausse est marquée en pourcentage », précise Nicolas Goldberg, responsable du pôle énergie du think tank Terra Nova. Voilà pourquoi la hausse est moins forte en option de base : 8,6 % TTC en moyenne.

On grimpe à 9,8 % TTC en option heures pleines/heures creuses. Et c’est plus encore pour Tempo. C’est la troisième option du tarif réglementé. Elle reprend la distinction heures pleines/heures creuses, mais découpe en plus l’année en trois catégories. 300 jours bleus, caractérisés par des prix du kWh très bas, 43 jours blancs, au cours desquels les tarifs grimpent tout en restant compétitifs par rapport aux options de base ou HP/HC. Et puis 22 jours rouges, placés entre le 1er novembre et le 31 mars. Ils correspondent aux jours de plus fortes tensions sur le réseau. Les prix deviennent alors exorbitants en heures pleines (75,76 cts d’euro). Avec cette nouvelle grille tarifaire, la hausse moyenne sur les factures d’électricité pour les clients Tempo est de 14 % TTC en moyenne, indique EDF. Les voilà en partie, les 3 % de Français évoqués par Bruno Le Maire le 21 janvier.

Heures creuses et Tempo encore compétitives

Est-ce à dire que les options HP/HC et Tempo ne valent plus le coup ? Julien Gorintin, directeur innovation de Lite, entreprise qui accompagne les particuliers dans le choix de leur contrat d’électricité, relativise. Une grande partie des Français peuvent toujours y trouver leur compte, à condition de reporter en heures creuses les consommations électriques qui peuvent l’être (chauffe-eau, machine à laver, recharge de la voiture électrique, etc.). Le seuil de rentabilité de l’option HP/HC est de 33 % pour un ménage qui consomme 6 000 kWh par an et pour une puissance souscrite de 6 kVA (2). En clair : il faut être en mesure de placer autant de sa consommation annuelle en heures creuses pour que cette option soit plus rentable que celle de base. « Un taux facilement atteignable, quel que soit le profil du ménage, assure Julien Gorintin. Il y a deux ans, le seuil était bien plus autour de 50 %. » Même constat pour Tempo : « Cette option était tombée en désuétude, peu mise en avant par EDF car plus compliquée à expliquer aux particuliers et plus difficilement comparable avec les autres offres. Mais depuis quelques années, l’évolution des tarifs la rend très intéressante, tant les prix sont bas en jours bleus. » Cela commence visiblement à se savoir : avec 500 000 abonnés fin 2023, l’option en compte 300 000 de plus qu’un an plus tôt.

Mauvais signal ?

Tout de même, cette hausse de l’accise a pour effet d’écorner la compétitivité des options HP/HC et Tempo par rapport à celle de base. Et cela le sera plus encore dans un an, alors que Bruno Le Maire a annoncé vouloir porter cette taxe au niveau d’avant-crise. Soit 32 € le MWh. « Comme signal, ce n’est pas top », estime Nicolas Goldberg, qui renvoie aux enjeux de la transition énergétique en cours. Elle se traduira en effet par une augmentation de la consommation française d’électricité et l’essor, dans notre mix électrique, des énergies renouvelables dont la disponibilité est plus fluctuante. « Dans ce contexte, il y aura un intérêt croissant à rendre le plus possible flexibles nos consommations électriques pour passer les pointes, reprend-il. Or, c’est ce que permettent l’option heures pleines/heures creuses et plus encore Tempo, bien trop peu encore mise en avant en France. » À terme, EDF vise 5 millions d’abonnés à son offre Tempo. Depuis le 1er juillet, les fournisseurs disposant d’un portefeuille de plus de 200 000 clients doivent aussi proposer « une offre à tarification dynamique » sur le même principe que Tempo. « Ils ne l’ont pas tous fait encore et ceux qui s’y sont pliés ont mis en place des offres peu lisibles ou pas toujours dignes d’intérêt », souligne Julien Gorintin. Nous le constations le mois dernier avec l’option Heure Eco+ de TotalEnergie.

(1) On est alors sur des augmentations de 10,5 % du prix du kWh en option de base, de 9,75 % pour les heures pleines et de 13,12 % pour les heures creuses.

(2) En prenant en compte le coût de l’abonnement, ce ménage aura alors une facture annuelle d’électricité de 1 647 € en option heures creuses, contre 1 651,2 € en option de base.

Fabrice Pouliquen

Fabrice Pouliquen

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