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Ebooks illimitésAmazon hors la loi

En lançant Kindle Unlimited en décembre dernier, Amazon créait la polémique : cette offre d’accès illimitée à une sélection d’ebooks en échange d’un abonnement à 9,99 €/mois est-elle conforme à la loi Lang de 1981, révisée en 2011, sur le prix du livre ? Saisie par la ministre de la Culture Fleur Pellerin, la médiatrice du livre vient de répondre à la question : c’est non. Le libraire en ligne et les fournisseurs de services similaires ont trois mois pour adapter leurs offres. Reste à savoir comment.

La médiatrice du livre vient de mettre fin au débat qui agite le monde de l’édition depuis des semaines : oui, Amazon est bien hors la loi avec son offre Kindle Unlimited, qui permet de profiter d’ebooks en illimité pour 9,99 €/mois. Dans son avis rendu public il y a quelques jours, Laurence Engel explique en effet que la loi de 2011 relative au prix du livre s’applique bien aux offres par abonnement. Or, cette loi veut que l’éditeur conserve la maîtrise du prix ou du barème de prix acquitté par l’acheteur. Ce n’est pas le cas dans l’offre d’Amazon, qui a défini seul le tarif de son abonnement, comme d’ailleurs de Youboox et de Youscribe, qui avaient lancé des services similaires respectivement en 2011 et au printemps 2014. La ministre de la Culture Fleur Pellerin, qui avait saisi la médiatrice du livre en décembre 2014, leur a donné trois mois pour adapter leurs offres. Reste à savoir comment.

S’inspirer des bibliothèques

Difficile de donner la position d’Amazon, qui n’a pas souhaité répondre à nos questions. Chez Youscribe, on évoque des pistes, notamment celle qui consisterait à s’inspirer du modèle développé par les bibliothèques physiques pour les prêts de livres numériques. « Les libraires et les éditeurs sont dans la boucle, les flux techniques sont en place », explique Juan Pirlot de Corbion. Dans ce schéma, les bibliothèques achètent aux libraires les ouvrages à un prix jusqu’à deux fois supérieur au prix public, les libraires les achètent à leur tour à un éditeur numérique, qui les renvoie à la bibliothèque sous forme de fichier crypté de DRM (verrous numériques) dégradables. « Tout le monde y trouve son compte, y compris le lecteur pour qui le coût d’emprunt du livre tend souvent vers zéro », soutient le dirigeant. Tant mieux, mais cette option dont les contours restent à définir ne règle pas le point de blocage principal, à savoir la fixation du prix du service par l’éditeur.

Pourquoi faire simple ?

Dans son avis, la médiatrice du livre suggère elle aussi plusieurs schémas, mais ils semblent difficilement applicables. Laurence Engel propose par exemple un système à points dans lequel l’abonnement mensuel permettrait au lecteur de provisionner un compte et d’emprunter un nombre d’ouvrages correspondant au crédit dont il dispose. Elle évoque encore deux formules à proposer, distinctement ou de manière combinée : d’une part, une offre « menu », à prix fixe sous forme de bouquet déjà constitué par le distributeur ; d’autre part, une offre « à la carte », à coût variable dans laquelle l’utilisateur choisirait les catalogues auquel il souhaite s’abonner. À Amazon et consorts de transformer ces propositions compliquées en offres commerciales attractives.

Éditeurs, libraires et pouvoirs publics doivent maintenant se mettre autour de la table pour évoquer ces différents scénarios. Surtout, ils devront s’assurer que les options retenues collent à la loi de 2011, car la médiatrice n’envisage pas un seul instant de la réformer. 

Camille Gruhier

Camille Gruhier

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