Marie Bourdellès
Le New Deal voté par le Parlement européen
Le Parlement européen vient d’adopter sa position sur les textes de la Nouvelle donne pour les consommateurs, présentée au printemps dernier par le Conseil européen. Soldes, avis en ligne, droit de rétraction, recours collectif : les amendements poussés par l’UFC-Que Choisir sont en grande partie validés. Ils constituent des avancées positives.
Une étape importante est passée dans l’examen des directives européennes de la Nouvelle donne des consommateurs (« New Deal for Consumers »). Cette dernière vise principalement une meilleure protection des individus dans l’ensemble des pays membres et le respect des dispositions existantes par les entreprises. Alors que la Commission a présenté le projet en avril dernier, le Parlement européen vient de voter ce texte. Les deux volets « modernisation des droits des consommateurs » et « recours collectif » ont fait l’objet d’amendements motivés par l’UFC-Que Choisir, dont beaucoup ont été adoptés.
Directive « modernisation des droits des consommateurs »
Bonne nouvelle, le renforcement des obligations des commerçants en période de soldes a été approuvé. Le Parlement confirme l’interdiction suivante : « Afficher une réduction de prix sans indiquer le prix de référence à partir duquel la réduction de prix est annoncée et sans pouvoir justifier de sa réalité dans les 30 jours précédant l’annonce. » Cette disposition permettrait à la France de revenir à une situation qui prévalait jusqu’à l'arrêté du 11 mars 2015 qui a considérablement allégé les obligations des commerçants. Selon l’article 1 de cet arrêté, « toute annonce de réduction de prix est licite sous réserve qu'elle ne constitue pas une pratique commerciale déloyale au sens de l'article L. 120-1 du code de la consommation et qu'elle soit conforme aux exigences du présent arrêté ». Le calcul du prix de référence n’est donc plus encadré, ce qui ouvre la voie à des pratiques frauduleuses et l’affichage de fausses promotions. La nouvelle mesure permettrait de lutter plus efficacement contre ces phénomènes.
Idem pour les plateformes qui publient des avis en ligne : la demande d’amendements poussant à ce que la législation française en vigueur depuis le 1er janvier 2018 soit incluse dans les dispositions de la directive européenne a été validée. Quelles que soient les décisions finales, la France pourra de toute façon maintenir ses obligations de la loi numérique.
Le droit de rétractation suivant un achat à distance reste intact. Le Parlement a en effet retoqué la possibilité pour une entreprise de refuser ce droit en cas d’utilisation du produit. Le consommateur continue ainsi d’en bénéficier pleinement durant quatorze jours suite à un achat conclu à distance ou lors d’un démarchage. L’UFC-Que Choisir souhaite que ce droit s’étende aux achats effectués lors d’une foire ou d’un salon, mais un tel amendement n’a pas été déposé, et ne peut donc pas être adopté pour l’instant.
Enfin, le renforcement des sanctions à l’égard des entreprises qui ne respectent pas la législation a été validé par le Parlement européen, qui annonce que « pour les infractions transfrontalières […], le montant maximal des amendes pourra atteindre 10 millions d’euros ou au moins 4 % du chiffre d’affaires annuel réalisé au cours de l’exercice financier précédent dans l’État membre ou les États membres concernés, le montant le plus élevé étant retenu ». Cette mesure s’accompagne de la création d’un fonds dédié à la réparation en cas de préjudice subi par les consommateurs ou de préjudice environnemental, avec l’obligation pour les États membres d’utiliser les revenus des amendes pour l’alimenter.
Le recours collectif
Le texte adopté concernant la possibilité pour les consommateurs d’engager une demande de recours collectif (ou action de groupe) à l’échelle européenne est, là aussi, en ligne avec les aspirations de l’UFC-Que Choisir. D’une part, un préjudice subi par des personnes de plusieurs États membres pourra faire l’objet d’une action de groupe, via une entité qualifiée telle qu’une association de consommateurs. Si un tel système existe aujourd’hui dans plusieurs États de l’Union européenne, cette mesure assujettit l’ensemble des pays membres à sa mise en place. D’autre part, une entreprise condamnée à dédommager les consommateurs sera dans l’obligation de payer l’entièreté de la fraude. À ce jour en France, seuls les individus qui se manifestent sont remboursés. Avec ces nouvelles dispositions, une société condamnée versera l’argent non donné aux consommateurs (qui ne se seront donc pas déclarés) à un fonds public spécialement créé à cette fin.
Les prochaines étapes
Le Conseil européen, qui représente les pays membres, doit se prononcer sur ces deux directives en février 2019. Ensuite, les trois entités européennes (le Conseil, le Parlement et la Commission) se réuniront pour harmoniser les propositions du Conseil et du Parlement, avant l’adoption définitive des textes.
Karine De Crescenzo