Morgan Bourven
Ils veulent monter en gamme
Pour accompagner les repas de fêtes de fin d’année, pourquoi ne pas se tourner vers un crémant ? Les huit régions productrices tentent de positionner leurs crémants à mi-chemin entre les proseccos peu chers et les champagnes. En ont-ils les capacités ? Pour le savoir, nous en avons dégusté en provenance d’Alsace.
Les crémants connaissent une forte croissance ces dernières années. Les huit régions viticoles autorisées à en produire (Alsace, Bordeaux, Bourgogne, Die, Jura, Limoux, Loire, Savoie) ont écoulé 90 millions de bouteilles en 2019, un record. Elles visent la barre des 100 millions en 2022. « La locomotive des ventes est l’export : le prosecco a désinhibé le consommateur, qui a pris l’habitude de consommer des bulles », a expliqué Édouard Cassanet, vice-président de la Fédération nationale des producteurs et élaborateurs de crémant, fin septembre, lors d’une conférence de presse à Paris.
La stratégie des producteurs pour séduire toujours plus de consommateurs ? Une mise en avant des terroirs et une offre de qualité supérieure. « Notre objectif est de combler le vide entre le prosecco à 6 € et le champagne à plus de 20 € », a expliqué Édouard Cassanet. Soulignant que, comme le champagne, les crémants sont élaborés selon une méthode traditionnelle, il juge illogique qu’ils se trouvent à 5 ou 6 €.
Entre le prosecco et le champagne
Symbole de cette ambition, chaque région a créé une catégorie supérieure (Éminent, Émotion…), avec notamment un vieillissement sur lattes plus long. Les viticulteurs, eux, n’hésitent plus à multiplier les cuvées : crémants blancs, rosés, monocépages… Pour ces productions premium, « nous souhaitons atteindre un prix de 15 à 20 € », a poursuivi Édouard Cassanet. Une montée en gamme que certaines appellations réaliseront plus facilement que d’autres, en raison de leur histoire et de leur terroir. Olivier Sohler, directeur de la Fédération nationale des producteurs et élaborateurs de crémant, résume cette tendance : « L’idée est de développer la gamme pour avoir un éventail plus large de bouteilles en accentuant la notion d’appartenance géographique. »
Cette évolution permettra-t-elle aux crémants de se tailler une place à côté des champagnes ? Pour en avoir une première idée, en même temps que notre test de champagnes, nous avons dégusté 6 bouteilles venues d’Alsace, qui représente près de la moitié du marché des crémants. On remarque déjà que même si leur typicité ne se retrouve pas toujours dans les bouteilles – en particulier celles de la grande distribution, où le sucre est souvent trop présent –, les cuvées achetées directement au producteur peuvent concurrencer les champagnes ne possédant pas un grand terroir ou n’en exploitant pas tout le potentiel.
Les résultats de notre dégustation
3 crémants achetés en grande distribution
Pierre Chanau • Crémant d’Alsace brut
Fourni par Alliance Alsace, acteur majeur de la filière des vins biologiques alsaciens, ce crémant jaune vif affiche un nez fin avec une pointe d’évolution. La bouche est croquante, agréable, équilibrée, et sa finale, tout en vivacité.
5,99 € 11/20 Lieu d’achat : Auchan
Rebmann • Crémant d’Alsace brut
Élaboré par la plus grande cave viticole d’Alsace, Bestheim, ce crémant offre un nez élégant et soigné sur des fruits à chair blanche. En bouche, il est rond, léger, avec une finale acidulée sans tension. Son dosage est très présent.
5,99 € 10,5/20 Lieu d’achat : E. Leclerc
Arthur Metz • Crémant d’Alsace brut cuvée spéciale 1904
Ce crémant produit par le géant viticole Grands chais de France (GCF) présente un nez net, axé sur les fruits à chair blanche. La bouche est gourmande mais un peu lourde, avec un dosage bien perceptible.
7,99 € 10,5/20 Lieu d’achat : Auchan. Disponible aussi sur Arthurmetz.com.
3 crémants achetés en propriété
Mann • Crémant d’Alsace brut nature 2018
Vieilli pendant 30 mois sur lattes, cet assemblage de chardonnay, de pinot noir et de pinot auxerrois provient d’un domaine certifié bio. Son nez est en finesse sur le citron, l’anis et l’amande. La bouche s’avère élancée, fraîche, avec une finale élégante.
17 € 13,5/20 Vins-mann.com ; tél. : 03 89 24 26 47.
Valentin Zusslin • Crémant d’Alsace brut zéro
Cet assemblage de pinot auxerrois, de pinot gris et de riesling a été élevé 18 mois sur lattes puis dégorgé sans ajout de sucres (brut zéro). Son nez est pur, sa bouche, élégante, tendue dans l’équilibre, signe d’un terroir de qualité. Domaine certifié Biodyvin.
19,50 € 12/20 Zusslin.com ; tél. : 03 89 76 82 84.
Dirler-Cadé • Crémant d’Alsace riesling 2016 brut nature
Ce 100 % riesling d’un domaine en biodynamie (Demeter) dispose d’un nez citronné, fruité, charnu. La bouche est croquante, cristalline et saline, équilibrée. La finale se révèle fraîche et citronnée. Le dosage s’élève à 0,8 g/l.
21,30 € 11/20 Dirler-cade.com ; tél. : 03 89 76 91 00.