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Complémentaire santéUn maintien opportun pour les salariés au chômage

La portabilité permet à un salarié privé d’emploi de continuer à bénéficier de sa mutuelle santé. Coup de projecteur sur ce dispositif qui devrait être particulièrement utilisé dans les mois qui viennent.

Nul besoin d’être un grand économiste pour anticiper, dans les mois qui viennent, une forte hausse du chômage. L’Unédic vient d’ailleurs de publier ses prévisions financières et anticipe, pour cette année, la destruction de 230 000 emplois, ce qui porterait le nombre total de chômeurs indemnisés à 2,95 millions de personnes… Dans ce contexte, il apparaît nécessaire de rappeler qu’il existe une portabilité ou maintien des garanties santé de l’entreprise. Même s’il est en vigueur depuis 2014, ce dispositif légal (art. L. 911-8 du Code de la Sécurité sociale) reste peu connu : il bénéficie pourtant aux salariés ayant perdu leur emploi, dès lors qu’ils étaient préalablement couverts par le contrat santé collectif de leur entreprise, pour lequel l’employeur a l’obligation de payer au moins 50 % de la cotisation. Ce dispositif s’applique aussi, depuis 2015, et dans les mêmes conditions, au maintien des garanties de prévoyance collectives (décès, invalidité…).

Qui est concerné ?

Tout salarié licencié pour motif économique, ou de façon individuelle, pour un motif autre que celui de la faute lourde et qui bénéficie en parallèle d’un droit à indemnisation par l’assurance chômage.

Peuvent également bénéficier de cette portabilité, les personnes qui perdent leur emploi dans l’une des situations suivantes :

  • fin de CDD (d’une durée au moins égale à un mois) ;
  • rupture conventionnelle ;
  • rupture du contrat d’apprentissage ou de professionnalisation ;
  • démission légitime (pour suivre son conjoint ou son partenaire de pacs qui déménage pour motif professionnel par exemple).

Comme précédemment, ces salariés doivent impérativement avoir droit à une prise en charge par l’assurance chômage. À noter que les ayants droit (conjoint, enfants…) des salariés ayant perdu leur emploi peuvent, eux aussi, continuer à être couverts par le contrat santé collectif dont ils bénéficiaient auparavant (même si cela tombe sous le sens, mieux vaut préciser qu’aucune condition d’indemnisation par Pôle emploi n’est requise pour eux). En revanche, les personnes qui font valoir leurs droits retraite ne peuvent pas se prévaloir de ce dispositif. Elles ont toutefois la possibilité de conserver la mutuelle de leur entreprise à titre individuel, dans des conditions tarifaires spécifiques durant les 3 premières années.

De quelles garanties peut-on bénéficier ?

Exactement des mêmes garanties que précédemment. Rien n’est ajouté, rien n’est retiré non plus.

Combien de temps dure cette portabilité ?

D’une manière générale, ce maintien des droits peut aller jusqu’à 12 mois dans la mesure où le dernier contrat de travail a duré, lui aussi, au moins 12 mois.

Pour les autres salariés, ce droit est limité à la durée de leur dernier contrat de travail. Un salarié qui cumule 2 CDD de 3 mois par exemple (et qui n’a pas renoncé au bénéfice du contrat collectif comme la réglementation l’y autorise dans certains cas) a ainsi droit à un maintien de ses garanties santé de 6 mois. Dans le même esprit, un salarié dont le CDD a été conclu pour une durée de 6 mois et 15 jours par exemple peut bénéficier d’une portabilité durant 7 mois car le décompte a lieu par mois entier.

Cette portabilité cesse lorsque le demandeur d’emploi recouvre un travail et n’est plus indemnisé par Pôle emploi avant la fin de la période maximale des 12 mois. Elle cesse également avec la fin des droits à indemnisation chômage ou pour les salariés seniors, avec la liquidation de leurs droits à pensions de retraite. À noter que les entreprises du BTP (bâtiments et travaux publics) ont conventionnement adopté une portabilité dont la durée peut aller aujourd’hui de 18 à 36 mois.

Ce maintien des garanties santé est-il vraiment gratuit ?

Oui. Le salarié privé de son emploi (et ses éventuels ayants droit) n’a absolument rien à payer quelle que soit la durée pendant laquelle il va en bénéficier. Ce mécanisme de solidarité est financé à la fois par les salariés actifs et par leurs employeurs. Ce point devrait d’ailleurs poser un sérieux problème dans les mois qui viennent. Le Centre technique des institutions de prévoyance (CTIP), instance qui représente les organismes spécialisés dans la couverture des salariés des entreprises ou des branches professionnelles, s’est d’ailleurs penché sur cette question très récemment au vu de l’ampleur de la crise et de la forte hausse du nombre de chômeurs qui devrait intervenir avec l’arrêt ou la diminution des mesures gouvernementales de soutien à l’économie : « À partir du second semestre et au plus tard à la fin de l’année, nous anticipons une hausse brutale du taux de recours à la portabilité, et donc une forte augmentation du coût de ce mécanisme, évalué, pour le moment, et pour les institutions de prévoyance, à 300 millions d’euros », nous a indiqué Marie-Laure Dreyfuss, déléguée générale du CTIP. Pour mémoire, en 2019 et en 2020, le coût de la portabilité, supporté par les 2 millions d’entreprises et les 13 millions de salariés couverts collectivement par une institution de prévoyance, a été d’une centaine de millions d’euros, soit environ 3 fois moins…

Quelles démarches effectuer pour en bénéficier ?

Justifier rapidement d’une effective ouverture des droits à indemnisation par l’assurance chômage auprès de l’organisme de complémentaire santé collective (il s’agit majoritairement d’une institution de prévoyance, mais il peut aussi s’agir d’une mutuelle ou d’une société d’assurances).

Dans les faits, l’employeur doit informer l’assureur de la rupture du contrat de travail. La portabilité démarre alors le jour qui suit celui de la rupture du contrat de travail. Elle est directement liée au bénéfice d’une indemnisation chômage, même si celle-ci n’est pas immédiate du fait des périodes de différés d’indemnisation calculées par Pôle emploi, lorsqu’un salarié perçoit une indemnité compensatrice de congés payés ou une indemnité supra légale de rupture de son contrat de travail. Une fois déterminée la durée maximale de la portabilité, l’organisme complémentaire santé est en droit de réclamer à tout moment un justificatif d’indemnisation par Pôle emploi. À défaut de le produire, la portabilité des garanties santé s’interrompt.

Roselyne Poznanski

Roselyne Poznanski

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