Fabienne Maleysson
Colorations pour cheveuxLa touche d’essai n’est pas la panacée
Souvent très chargées en substances sensibilisantes, les teintures pour cheveux sont à l’origine de réactions allergiques fréquentes. La touche d’essai préconisée pour les éviter n’est pas fiable et serait même contre-productive, rappelle un comité d’experts européens.
En décembre dernier, le cas d’une jeune fille victime d’une réaction allergique impressionnante à une coloration capillaire avait fait grand bruit. Pourtant, la présence de substances extrêmement allergisantes dans ce type de produits n’est pas un scoop. Depuis des années, nous alertons nos lectrices et lecteurs sur ce point et lors de notre dernier test de teintures pour cheveux, nous avions renoncé à distinguer un meilleur choix pour cette raison. Le colorant le plus fréquemment utilisé, la p-Phenylenediamine, ainsi que plus d’une vingtaine d’autres sont pris en compte dans notre appli QuelCosmetic. Pour éviter les réactions à leurs produits, les fabricants conseillent de faire une touche d’essai sur la peau avant utilisation. Mais la procédure n’est pas encadrée et les conseils varient selon les marques (temps de pose et localisation de la touche d’essai, délai d’attente avant la lecture du résultat, etc.). L’organisme professionnel Cosmetics Europe a donc proposé une méthode standardisée, sur laquelle le SCCS (Scientific Committee on Consumer Safety, Comité scientifique pour la sécurité des consommateurs) vient de se prononcer.
Les experts européens pointent plusieurs limites à ce test. D’abord, le risque de faux négatif n’est pas écarté : on peut faire une touche d’essai sans qu’aucune réaction se produise et déclencher une allergie lors de la coloration elle-même. En conséquence, précise l’avis, « le comité ne peut, à ce stade, approuver son utilisation comme alerte pour les allergies de contact aux colorants capillaires chez les consommateurs ». Plus grave, l’habitude pourrait être contre-productive puisque le risque de déclencher une allergie est corrélé avec le nombre de mises en contact avec l’allergène. « Le test comporte le même risque fondamental de sensibilisation que l'utilisation d'un colorant capillaire par un consommateur. S’il est utilisé régulièrement avant la teinture des cheveux, il augmentera inévitablement le nombre d'expositions, ce qui peut augmenter le risque de sensibilisation », ajoute le comité. Enfin, les experts soulignent que les colorations capillaires ne sont pas supposées, selon la réglementation encadrant les cosmétiques, être utilisées sur la peau. Ils invitent donc les professionnels à imaginer d’autres moyens d’éviter les réactions allergiques chez les consommateurs. Ces réserves ne sont pas nouvelles et ont été exprimées à plusieurs reprises par les instances sanitaires françaises ou européennes, sans qu’un quelconque changement en résulte de la part des professionnels. Quant aux consommateurs et consommatrices, ils devraient à tout prix éviter de se teindre les cheveux s’ils ont un terrain allergique. Rappelons aussi que les colorations ne sont pas supposées être utilisées avant l’âge de 16 ans.