Florence Humbert
Cidres et poirésTrop de tricheries !
La Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a relevé de nombreuses non-conformités dans des cidres et poirés commercialisés auprès du grand public. Une évolution de la réglementation est nécessaire pour améliorer leur qualité et l’information au consommateur.
Pétillant, fruité, rafraîchissant et faiblement alcoolisé, le cidre a gardé l’image d’un produit naturel. Le dernier plan de surveillance des produits cidricoles effectué par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) vient pourtant de jeter un pavé dans la mare. Pratiques interdites comme la gazéification des cidres d’appellation d’origine protégée (AOP), défauts gustatifs, mouillage, problèmes de stabilité microbiologique, défauts physico-chimiques, etc. Un tiers (32,8 %) des échantillons de cidres et de poirés analysés se sont révélés non conformes, tandis que 18 % étaient déclarés « à surveiller » !
Du côté des jus de pommes et de poires, les dérives sont moins nombreuses et portent principalement sur l’étiquetage et l’excès d’éthanol (dû à la fermentation du sucre). Ce sont les vinaigres et autres produits dérivés qui remportent la palme : près des trois quarts des produits analysés ont été déclarés « non conformes » ou « non satisfaisants » ! En cause, une fois encore, le non-respect des niveaux d’alcool résiduel et d’acidité, fixés par le décret no 88-1207 du 30 décembre 1988. À cela s’ajoute une présentation souvent trompeuse des produits concernés, notamment sur les sites de vente en ligne : vertus thérapeutiques injustifiées pour des vinaigres, confusion entre les produits fabriqués à la ferme et les produits industriels, mention d’une fermentation naturelle pour des cidres qui ont fait l’objet d’une légère gazéification lors de l’embouteillage, etc.
Clarification indispensable
Au final, les inspecteurs de la répression des fraudes ont distribué 41 avertissements, pris 2 mesures administratives et procédé à 3 injonctions pour 186 établissements contrôlés. Mais il serait injuste d’extrapoler les résultats de cette enquête à l’ensemble de la filière, souligne la DGCCRF, d’autant que les contrôles sont ciblés sur la base d’une analyse de risques préalable (produits non conformes lors de précédents contrôles, courriers de consommateurs, risques connus…) et que « la part des produits conformes (49 %) augmente régulièrement ». Est-ce à dire que tout baigne au pays du cidre ? Sûrement pas. Une révision de la réglementation est d’ailleurs à l’étude, nous a précisé la DGCCRF. Son objectif : actualiser le décret « cidre » du 30 septembre 1953 afin de tenir compte de l’évolution des pratiques et d’améliorer l’information des consommateurs, notamment avec la révision des mentions « brut », « demi-sec », « sec » ou de la teneur en sucre et la définition de nouvelles dénominations telles que « extra brut », « cidre de glace » ou « fermier ».
Une clarification indispensable sur un marché où coexistent des produits industriels issus à 50 % de moûts concentrés et des cidres pur jus élaborés dans le droit fil de la tradition par des artisans passionnés. Sous la même étiquette se retrouvent donc des produits forts différents, dont le consommateur est malheureusement peu averti.