Arnaud de Blauwe
Pas d’indemnisation en cas de collision avec un oiseau
La Cour de justice de l’Union européenne a une nouvelle fois eu à interpréter le règlement européen de 2004 sur les droits des passagers de l’aérien. Elle a considéré que ces derniers ne peuvent pas prétendre à l’indemnisation forfaitaire en cas de retard dû à une panne provoquée par une collision entre un avion et des oiseaux.
Le règlement européen 261/2004 encadre les droits des passagers de l’aérien et oblige les compagnies à leur verser une indemnité forfaitaire variant de 250 à 600 € (selon la longueur du trajet) dans certaines situations. Mais, au fil du temps, le texte a été interprété et complété par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE). Ses décisions s’imposent à l’ensemble des États membres.
Dans un arrêt daté du 4 mai 2017, elle vient à nouveau de se pencher sur ce fameux règlement dont la révision, en cours depuis plusieurs années, est pour l’heure totalement bloquée. La Cour, qui siège à Luxembourg, a estimé qu’une compagnie aérienne n’avait pas à indemniser ses clients en cas de retard dû à une panne de l’avion occasionnée par une collision avec des oiseaux.
Les juges européens avaient été saisis pour « éclaircissement » par la Cour constitutionnelle tchèque qui avait à statuer sur la procédure lancée par deux passagers dont le vol avait été retardé pour cette raison.
La question était de savoir si une collision aviaire pouvait être définie comme étant une « circonstance extraordinaire » au sens du règlement européen. Si tel est le cas, la compagnie est déchargée de son obligation d’indemnisation. Le texte ne définit cependant pas précisément ce que peut être une « circonstance extraordinaire ».
Dans ce dossier, l’avocat général de la CJUE avait estimé que « le péril animalier dans l’activité du transport aérien est un phénomène connu et parfaitement appréhendé par les acteurs de ce secteur ». Dès lors, une compagnie ne peut pas être exonérée, pour ces motifs, de ses responsabilités et obligations indemnitaires.
La Cour n’a pas suivi l’avocat général sur cette piste : il s’agit bien d’une « circonstance extraordinaire » ! « Une collision entre un aéronef et un volatile ainsi que l’éventuel endommagement provoqué par cette collision […] ne sont pas, par leur nature ou origine, inhérents à l’exercice normal de l’activité du transporteur aérien concerné et échappent à sa maîtrise effective », ont justifié les juges. Ils ont toutefois rappelé que la compagnie devait entreprendre tous les efforts raisonnables d’un point de vue économique afin d’éviter l’annulation ou le retard d’un vol.
Dans le passé, la CJUE avait plutôt eu tendance à renforcer les droits des passagers lorsqu’elle était amenée à se pencher sur le règlement européen. En 2009, dans un arrêt très remarqué, elle avait estimé que les retards (plus de 3 h à l’arrivée) devaient être couverts par le système d’indemnisation forfaitaire, applicable jusque-là aux seuls cas d’annulation de vol ou de surbooking. À plusieurs reprises, la Cour avait également eu à se prononcer sur la notion de « circonstances extraordinaires ». Elle a ainsi considéré qu’un problème technique à l’avion n’entrait pas dans ce cadre.