Laurence Delain-David
Assurance vieLe palmarès des rendements 2017
Le cru 2017 de l’assurance vie en euros s’annonce de nouveau bien médiocre, avec des performances en recul. Mais plusieurs signes indiquent que ce cycle baissier pourrait toucher à sa fin. Explications.
Le nouveau repli du rendement des fonds en euros attendu en moyenne autour de 1,5 % pour l’ensemble du marché en 2017 (contre 1,8 % en 2016) n’est pas vraiment une surprise.
Majoritairement placés en obligations d’État et d’entreprises, les compartiments sécurisés des contrats d’assurance vie continuent de subir les effets de la baisse historique des taux longs que connaît la France depuis cinq ans. Certes, celle-ci tend à s’enrayer. Tombé au cours de l’été 2016 sous le seuil des 0,2 %, le taux de l’OAT 10 ans (obligation assimilable du Trésor qui constitue l’indice de référence du secteur) est remonté depuis le début de l’année aux alentours de 0,8 %. Mais comme le rappelle Cyrille Chartier-Kastler, fondateur du site Goodmoneyforvalue.eu, « cet environnement de taux bas continue de produire un effet mécanique sur les portefeuilles des compagnies : au fur et à mesure qu’ils se renouvellent sous le double effet de l’encaissement des primes nouvelles et des sorties, ils se diluent car la part d’obligations plus rentables acquises il y a huit ans ou plus qui a longtemps permis de freiner la perte de rentabilité des fonds en euros se réduit ». Résultat, cet expert indépendant anticipe d’ores et déjà pour 2018 une nouvelle réduction de la rémunération moyenne des fonds en euros autour d’un pivot de 1,3 %. Ce qui, une fois déduits les prélèvements sociaux (passés cette année de 15,5 % à 17,2 %) et les frais sur primes des contrats, laisse à penser que ce placement générera, dans la plupart des cas, un rendement net d’inflation négatif.
Alors, faut-il, comme le conseillent les réseaux bancaires, troquer ces supports au capital garanti à tout moment contre des UC (unités de compte) qui, exposées aux marchés financiers qu’elles suivent à la hausse comme à la baisse, sont susceptibles de rapporter beaucoup plus (l’an passé le Cac 40 a bondi de près de 10 %) mais également d’encaisser des pertes sévères ? Pas forcément. Plusieurs indicateurs poussent en effet à relativiser ce discours commercial.
Disparité
Tout d’abord, comme chaque année, le marché est loin d’être homogène. Les écarts continuent de se creuser entre les enseignes ou, pour une même compagnie, d’un canal de distribution à l’autre (les réseaux patrimoniaux et Internet sont souvent favorisés). D’un côté les gros contrats standards de la bancassurance, soucieuse de préserver ses marges, tirent les rendements vers le bas (aux alentours de 1 % à 1,2 %). Mais en face, les offres promues par les associations d’assurés (Afer, Asac-Fapes, Gaipare, Agipi…) et certaines mutuelles (la MIF, le Conservateur, la Carac, la Macsf, etc.) font résolument de la résistance avec des taux toujours au-dessus de la barre des 2 %, voire des 3 % si l’on retient le résultat exceptionnel affiché par la mutuelle Garance (ex-MNRA dédiée aux artisans et commerçants). « Notre performance s’inscrit dans la continuité de la politique financière que nous menons depuis des années et illustre sa pertinence à long terme », remarque Gilles Dupin, P-DG du groupe Monceau Assurances, une compagnie qui, comme la SMA Vie BTP, est parvenue à servir en 2017 un taux en hausse par rapport à l’exercice précédent.
Provision pour l’avenir
La taille des contrats concernés explique en partie ce contraste, car on ne gère pas avec la même dextérité plusieurs milliards d’euros ou quelques centaines. Mais le volume n’explique pas tout. Ces différentiels de taux reflètent également la volonté qu’ont – ou pas – les compagnies de faire profiter leurs clients des fruits de la gestion des actifs où sont investies les sommes collectées sur les fonds euros. Celle-ci est pourtant plus rentable qu’on ne l’imagine. En témoignent les réserves financières florissantes des assureurs qui, pour compenser la baisse des taux obligataires, n’ont eu de cesse depuis quatre ans de renforcer leur provision pour participation aux bénéfices. Cette PPB, qui permet aux compagnies de mettre temporairement en réserve une fraction des revenus dégagés par la gestion de leurs fonds en euros, représentait fin 2016 plus de 3 % des encours (soit une quarantaine de milliards d’euros). Mieux, si l’on tient compte des plus-values latentes obligataires (mises en réserve de capitalisation) et de celles non réalisées attachées aux actions et actifs immobiliers présents dans les portefeuilles des assureurs, ce pourcentage, qui équivaut à une réserve de rendement, grimpait à 7,75 % selon une étude publiée en décembre dernier par le site Goodmoneyforvalue.eu.
Plancher
Tout laisse à penser que ce taux augmentera encore en 2017. Or légalement, les assureurs sont tenus de redistribuer la PPB aux assurés dans les huit années qui suivent leur constitution. Ce matelas incite d’autant plus à mettre un bémol aux propos alarmistes tenus ces derniers temps sur l’assurance vie en euros que, sauf retournement brutal de conjoncture, on se dirige a priori vers une repentification en douceur de la courbe des taux, un scénario favorable aux assureurs qui pourront adapter la gestion de leur portefeuille au fil de l’eau. « Si nous privilégions l’hypothèse d’une remontée progressive des taux à partir de la mi-2018, la PPB devrait pouvoir être utilisée par le secteur afin de soutenir les taux servis durant plusieurs années et "contrebalancer" l’effet dilutif des obligations achetées durant la période 2015-2018. Cela nous pousse à penser que les fonds en euros pourraient atteindre un plancher à la baisse fin 2018 avant de se redresser progressivement », conclut Cyrille Chartier-Kastler.
Quid de la flat tax ?
Plus de peur que de mal ? C’est finalement ce qui ressort de l’examen de l’application du nouveau PFU (prélèvement forfaitaire unique) de 12,8 % entré en vigueur le 1er janvier et qui, majoré des prélèvements sociaux passés à 17,2 %, constitue la fameuse flat tax de 30 %.
Tout d’abord, rappelons-le, la réforme s’applique uniquement aux intérêts générés par les primes encaissées après le 27 septembre 2017. Les produits associés aux primes enregistrées avant cette date restent, en cas de retrait, soumis au régime précédent : prélèvement forfaitaire libératoire de 35 % et 15 % selon que le contrat a respectivement moins de quatre ans ou entre quatre et huit ans, puis de 7,5 % passé ce délai après abattement de 4 600 € (ou 9 200 € pour un couple). Les produits générés par des versements effectués après le 27 septembre 2017 seront, quant à eux, taxés à 12,8 % en cas de retraits avant huit ans (ce qui est plus avantageux que précédemment). Et au-delà de huit ans, ils resteront soumis au taux réduit de 7,5 % (au lieu de 12,8 %) sous réserve que l’encours de l’ensemble des contrats d’assurance vie détenus par le contribuable n’excède pas 150 000 €. En résumé, dans la grande majorité des cas, la fiscalité de l’assurance vie est allégée en cas de rachat, ce que déplore d’ailleurs le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) qui, dans un rapport publié le 25 janvier, suggère une nouvelle révision de la fiscalité de l’assurance vie. Affaire à suivre, donc...
Taux de rendement 2017 de 20 contrats d’assurance vie*
Établissement | Nom du contrat | Frais sur versement (minimum à la souscription) | Rendement 2017* (rappel du taux 2016) | Baisse sur un an |
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Afer-Aviva |
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Agipi/Axa France |
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Apicil |
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Asac Fapes-Allianz |
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Carac |
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Carrefour Axa France |
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Fortuneo/Suravenir (1) |
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GMF |
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Gaipare/Allianz |
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Garance (ex-MNRA) |
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ING Direct/Generali (2) |
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Le Conservateur |
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Linxea/Apicil (3) |
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Maaf |
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Macif/Mutavie |
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Macsf |
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Maif |
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MIF |
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Monceau Assurances |
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SMA Vie BTP |
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Source : Établissements.
*Taux nets de frais de gestion mais bruts de prélèvements sociaux et de frais sur versements.
(1) Le fonds en euros retenu est Suravenir Rendement, également présent dans d’autres contrats en ligne (ceux d’Altaprofits, assurancevie.com, Epargnissimo, Grisbee, Linxea...). Un autre fonds « euroactif », Suravenir Opportunités, plus rémunérateur (2,80 %) mais soumis à condition d’UC est aussi proposé.
(2) Le fonds en euros concerné est Eurossima, également présent dans d’autres contrats en ligne (Boursorama vie, Altaprofits vie, Linxea, mes- placements vie, etc.). Un autre fonds « europierre », Netissima, plus rémunérateur (2,10 %) mais soumis à condition d’UC est aussi proposé.
(3) Linxea vend d’autres contrats assurés par Generali, Suravenir ou Spirica offrant, sous conditions d’UC, des fonds en euros plus rémunérateurs.