Laurence Delain-David
Assurance-vieBonus sous surveillance
Après les taux garantis boostés, voici le temps des ventes avec primes et autres bonus en assurance-vie. Une pratique commerciale pointée du doigt par l’Autorité de contrôle prudentiel (ACP).
Les assureurs ont décidemment plus d’un tour dans leur sac. Contraints depuis le 1er août dernier à davantage de prudence dans l’annonce de leurs taux garantis (arrêté du 7 juillet 2010), ils ont rapidement trouvé la parade marketing en lançant un nouveau type de promotion pour leurs contrats d’assurance-vie : les ventes avec primes ou encore avec bonus à la clé.
Dans le premier cas, l’assureur propose un « cadeau » de quelques dizaines d’euros au souscripteur dès lors que ce dernier s’engage à investir un montant suffisamment important dans le contrat et l’oriente en partie sur des unités de compte (placées sur les marchés financiers, donc plus risquées que le fonds en euros). Le principe des bonus est assez proche dans son fonctionnement, si ce n’est que l’assureur propose non pas une prime d’argent, mais une bonification de taux.
C’est le cas par exemple de l’offre « Bonus Euro+ ». Lancée par Axa à grand renfort de publicité sur les écrans de télévision et dans la presse, cette promotion valable pour la plupart des contrats distribués par la compagnie repose sur une mécanique relativement simple. « Nous proposons un bonus de 0,15 % sur le taux net du support en euros sous réserve qu’au 31 décembre 2010, le client respecte l’un des deux critères suivants : soit son contrat est investi en unités de compte à hauteur de 25 % minimum, soit le montant d’épargne en compte est supérieur ou égal à 50 000 euros », explique-t-on chez Axa. Si l’assuré remplit conjointement les deux critères, le bonus de revalorisation, calculé sur le taux net de frais de gestion (mais brut de prélèvements sociaux) du rendement du support en euros, passe à 0,40 %. Pour profiter de cet « accélérateur de rémunération », l’assuré doit également respecter ces contraintes en cas de rachat, de versement supplémentaire ou d’arbitrage effectués entre le 31 décembre 2010 et le 1er avril 2011 (date d’attribution par l’assureur de la participation aux bénéfices). Autant de conditions qu’il vaut mieux avoir bien comprises avant de profiter de l’offre.
L’ACP prend position
Pointée du doigt début novembre par l’ACP (Autorité de contrôle prudentiel), la pratique des ventes avec primes a fait l’objet de la publication d’une position de la part du régulateur de l’assurance. Considérant que ces primes « s’analysent comme un engagement » de l’assureur, l’ACP souligne qu’elles doivent par conséquent « respecter la réglementation des montants garantis d’intérêts techniques et de participations aux bénéfices, notamment les articles A.132-2 et A.132-3 du code des assurances ». En d’autres termes, les calculs de taux qui résultent des primes offertes doivent être conformes aux règles prévalant en matière de taux garantis, donc en ligne avec la rentabilité réelle des actifs de la compagnie, tous contrats confondus et en adéquation avec les conditions du marché obligataire où sont investis les fonds en euros. « C’est simple, nous rappelons que ces pratiques commerciales ne doivent pas avoir pour résultat de promouvoir des taux actuariels non conformes au respect des engagements prudentiels des assureurs », résume Fabrice Pessin, secrétaire général adjoint de l’ACP. Dans son communiqué, l’Autorité de contrôle insiste notamment sur le fait que « le taux calculé à partir des primes offertes […] est d’autant plus important que la date à laquelle la prime sera versée se rapprochera de celle de la souscription du contrat ». « Lorsqu’un assureur vous offre 40 euros pour 1 000 euros investis, cela correspond à un taux actuariel annualisé de +4 % si la promotion est lissée sur 12 mois. Mais sur 30 jours, ce taux approche +50 % ! », remarque Fabrice Pessin.
Pour l’heure, la prise de position de l’ACP ne concerne que les ventes avec primes. Mais il n’est pas exclu qu’elle s’étende un jour aux ventes avec bonus. « Nous ne nous sommes pas encore penchés sur l’offre Bonus Euro+ », indique Fabrice Pessin.