Élisa Oudin
Assurance des catastrophes naturellesSur qui pèseront les surcoûts ?
Le gouvernement vient de recevoir les conclusions du groupe de 3 experts sur l’assurabilité des catastrophes naturelles. Ces derniers prônent des efforts pour tous, mais en particulier les assureurs et certaines catégories d’assurés.
Les compagnies d’assurances avaient bien anticipé la remise du rapport Langreney (du nom de l’un des 3 experts nommés par Bercy). Ce document a pour mission de formuler des préconisations afin de pérenniser le régime d’indemnisation des catastrophes naturelles (CatNat). Les assureurs ont en effet mené, la semaine dernière, une retentissante opération de communication pour alerter l’opinion sur l’ampleur des coûts à venir liés à l’indemnisation des risques climatiques… Et préparer les assurés à des hausses de cotisation salées. Le rapport, remis mardi 2 avril, apporte un son de cloche un peu différent. Sans remettre en question une nécessaire revalorisation de la cotisation sur les primes CatNat (répercutée à l’ensemble des assurés dans le cadre de leur assurance multirisque habitation), le rapport montre que d’autres mesures devront être adoptées, dont certaines pèseront plus particulièrement sur les assureurs. Le rapport n’oublie d’ailleurs pas d’indiquer que les compagnies bénéficient, dans le cadre du régime CatNat, d’une « protection de la Caisse centrale de réassurance et de l’État qui permet une magnifique économie de fonds propres ». Voici les principales recommandations émises par les experts, qui alimenteront le 3e plan national d’adaptation au changement climatique qui sera présenté par le gouvernement dans quelques semaines.
Bonus-malus pour les assureurs
Bercy vient de faire savoir qu’il reprendrait à son compte la mesure de bonus-malus suggérée par le rapport Langreney. Il s’agit à la fois de compenser le déséquilibre concurrentiel lié à la moindre présence de certains assureurs dans les zones les plus à risque de catastrophes naturelles (zones rouges et orange) et d’alimenter le fonds de prévention des risques naturels. Celui-ci doit notamment aider les particuliers à mettre en place des mesures préventives contre les catastrophes climatiques.
On sait en effet que les assureurs mutualistes sont par exemple plus présents (ils refusent moins de dossiers) dans les zones rouges que les compagnies privées. Ce bonus-malus consisterait en un abondement, par les assureurs, de la cotisation CatNat payée par les assurés. Ce prélèvement sur la marge engrangée par les compagnies serait plus faible, voire négatif pour les plus impliquées dans les zones à fort risque de catastrophes naturelles.
Augmentation de la cotisation sur les primes CatNat
Le gouvernement avait anticipé cette mesure dès la fin de l’année dernière, en annonçant une augmentation du taux de surprime CatNat pour octobre 2024. L’État aimerait faire passer ce taux de 12 à 20 % d’ici le 1er janvier 2025. Le rapport Langreney préconise même une revalorisation un peu plus élevée, mais le gouvernement se montre, pour l’instant, plus prudent sur ce point.
Des travaux « résilients » pour les assurés
La prévention est l’un des autres grands volets du dispositif présenté au ministère de l’Économie et des Finances. L’idée consiste à encadrer les chantiers menés après sinistre afin de les rendre plus « résilients ». C’est-à-dire de favoriser la réalisation de travaux permettant aux logements de mieux résister à d’autres périodes climatiques extrêmes. L’idée d’un dispositif proche de celui de MaPrimeRénov’ est notamment envisagée. Le fonds Barnier (notamment abondé par le bonus-malus imposé aux assureurs) servirait par exemple à mener des diagnostics « résilients » et à financer une partie des travaux jugés indispensables. Les assurés (des zones les plus exposées) qui ne réaliseraient pas ces travaux dans les 3 ans suivant un sinistre subiraient « un triplement de la franchise pour les sinistres CatNat suivants », propose le rapport.
Résidences secondaires et locatives pénalisées
Le régime des primes et franchises CatNat pourrait être moins protecteur pour les propriétaires de résidences secondaires et locatives que pour les autres logements. C’est ce qui est préconisé par le rapport Langreney, qui définit cette mesure comme « courageuse ». Il recommande de laisser le prix de ces primes et franchises libre (non plafonné), « plutôt que de déresponsabiliser les propriétaires de ces résidences, qui en ont les moyens, par un régime CatNat dont les primes et franchises sont fixées ».