Élodie Toustou
Comment déjouer les techniques des escrocs
Se faire délester de 2 500 € en 15 minutes chrono sur votre Compte personnel de formation (CPF), ce dispositif que les actifs (salariés, demandeurs d’emploi, indépendants, fonctionnaires) peuvent utiliser à leur gré pour monter en compétences ou se reconvertir ? C’est simple comme un coup de fil ! C’est la tentative dont a été la cible… la rédaction de Que Choisir ! Au bout du téléphone, un interlocuteur se revendiquant du « bureau du CPF » nous alerte : « Ça fait un certain temps que vous n’avez réalisé aucune activité sur votre compte et la Caisse des dépôts a la possibilité de geler une partie de vos fonds si vous ne les utilisez pas. » La solution proposée : suivre une formation pour éviter que nos euros ne s’évaporent.
Nous jouons le jeu et choisissons une formation en anglais. Après nous avoir aidés à nous connecter à notre compte CPF (sans lui communiquer nos identifiants personnels) et vérifié les montants des droits mobilisables, notre interlocuteur passe alors la main au « service de validation ». L’appel est transféré à un organisme de formation à distance situé en France. Une opératrice nous invite à cliquer sur un lien qu’elle nous envoie par mail pour « finaliser l’inscription ».
Ce dernier nous amène sur le vrai site du CPF (moncompteformation.gouv.fr) où l’organisme et sa formation sont bien référencés. Coût affiché : 2 490 € pour 4 heures de cours avec un vrai professeur (à distance) et un accès de 4 mois à une plateforme de e-learning. Nous refusons de confirmer l’inscription en demandant un délai de réflexion, ce à quoi la commerciale nous répond que si nous ne confirmons pas tout de suite, il nous sera impossible de nous inscrire par la suite !
Des arnaques protéiformes qui visent le même but
Usurpation de l’identité de Mon compte formation, pressions pour décrocher un engagement immédiat… Cet exemple illustre l’une des techniques développées par des escrocs qui ciblent actuellement les actifs. Entre 10 et 12 millions d’euros auraient été détournés de la sorte selon le gestionnaire du dispositif, la Caisse des dépôts, qui a déposé 26 plaintes en justice. Au moins 10 000 comptes seraient concernés (sur 38 millions), nous précise-t-il.
Derrière ces arnaques se cachent des organismes de formation qui, dans le meilleur des cas, ont confié leur campagne de recrutement à des sous-traitants (centres d’appels) plus soucieux de gonfler leurs chiffres que de rester dans les clous. Dans le pire, ce sont des escrocs dont l’organisme n’a qu’un objectif : encaisser les montants d’une fausse formation. Quitte à extorquer les données personnelles de l’actif pour l’inscrire à son insu.
Vigilance à l’approche du 30 juin
« Si on vous appelle pour vous parler de Mon compte formation, raccrochez ! », conseille la Caisse des dépôts, qui rappelle que ni elle, ni le ministère du Travail ou Pôle emploi ne contactera jamais personne par téléphone au sujet de son CPF.
Heureusement, les victimes de ces pratiques ont un recours : « Tous les droits qui ont été utilisés frauduleusement sont recrédités », nous précise la Caisse des dépôts qui invite les personnes qui auraient été ciblées, ou qui s’étonnent de la manière dont elles ont été démarchées, à le signaler sur le site ou l’application mobile Mon compte formation ou au 0970 823 551 (du lundi au vendredi de 9 h à 17 h, appel non surtaxé). En cas de doute, elles peuvent aussi consulter les pages spécialement réalisées par Cybermalveillance.gouv.fr pour déjouer les arnaques.
Attention, ces tentatives devraient se multiplier d’ici au 30 juin prochain. À cette date, les salariés qui n’auront pas encore crédité leurs anciens Droits individuels à la formation (DIF) sur leur compte CPF (et qui peuvent ainsi récupérer 1 300 € en moyenne), les perdront définitivement. Une échéance dont comptent bien profiter les escrocs qui misent sur l’urgence de la situation pour parvenir à leurs fins.
Mon compte formation affiche depuis aujourd’hui une évaluation des formations. Une note de 0 à 5 est attribuée par d’anciens usagers et repose sur cinq questions relatives à l’accueil, au contenu de la formation, à l’équipe de formateurs, aux moyens mis à disposition et à l’accompagnement. Un indicateur à utiliser pour juger du sérieux de l’organisme.