Erwan Seznec
Annonces immobilièresLeboncoin fait condamner Entreparticuliers.com
Le numéro un des petites annonces se faisait piller depuis 2011 par un concurrent, Entreparticuliers.com, qui récupérait des contacts et des photos de biens immobiliers pour alimenter son propre site.
Dans une décision du 1er septembre, Le tribunal de grande instance (TGI) de Paris a condamné à 40 000 € de dommages et intérêts le site Entreparticuliers.com, pour atteinte aux droits de propriété intellectuelle de la société LBC, autrement dit Leboncoin. Depuis des années, relève le tribunal, Entreparticuliers.com se livrait « à la réutilisation répétée et systématique » des annonces immobilières de son concurrent, qui précise dans un communiqué « avoir été alerté par de très nombreuses plaintes de ses utilisateurs ».
Comme l’a déjà révélé « Que Choisir », les télécommerciaux de cette société peu recommandable, basée à Levallois-Perret (92), avaient jusqu’à présent une seule mission : appeler des particuliers ayant mis une maison ou un appartement en vente sur Leboncoin et les faire signer le plus vite possible pour une annonce sur Entreparticuliers.com.
Afin de justifier leurs tarifs élevés (135 € pour 3 mois), ils faisaient miroiter l’existence de nombreux acheteurs potentiels… fantômes. Et pour cause : personne à Entreparticuliers.com n’est chargé de rechercher des acheteurs ! Dès que les particuliers avaient signé, leur annonce sur Leboncoin était récupérée, descriptif et photos compris.
La société LBC précise avoir demandé plusieurs fois à Entreparticuliers.com de cesser ses piratages, sans succès. Cette fois, le TGI a prononcé « des mesures d’interdiction de la poursuite de ces agissements », qui exposeraient Entreparticuliers.com à des sanctions pénales en cas de récidive. L’entreprise, qui n’a pas précisé si elle comptait interjeter appel, semble avoir partiellement compris le message. Depuis début septembre, d’étranges annonces immobilières sans photo, avec un simple plan de localisation du bien, se multiplient sur son site. Elle continue visiblement à démarcher des particuliers chez ses concurrents, mais s’abstient toutefois de récupérer les visuels.
Son dossier s’alourdit d’une deuxième condamnation, après celle prononcée en 2009 et confirmée en 2012, pour publicité mensongère et pratique commerciale trompeuse. À titre personnel, son P-DG, Stéphane Romanyszyn, avait alors été condamné à 3 mois de prison avec sursis et à 15 000 € d’amende, et l’UFC-Que Choisir avait reçu 30 000 € en raison du préjudice porté à l’intérêt collectif des consommateurs. Selon les témoignages de deux salariés, il suit avec attention tout ce qu’il se passe sur le plateau où travaillent ses commerciaux, écoutant la manière dont ils démarchent les clients potentiels. Le pillage de Leboncoin n’a pu s’organiser sans son aval.
Le tribunal de grande instance de Paris a été plus rapide que la direction départementale de la Protection des populations de Nanterre (DDPP 92), qui examine les pratiques commerciales contestables d’Entreparticuliers.com depuis au moins 2 ans. Elle a perquisitionné les locaux de Levallois-Perret en juin 2016, sans suite connue à ce jour.