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Affaire MaranathaL’étrange association de défense des épargnants

Créée en novembre, l’Adefima pose question. Cette association d’aide aux épargnants susceptibles d’être floués par le redressement judiciaire du groupe hôtelier Maranatha n'est pas totalement indépendante des conseils en gestion de patrimoine ayant vendu les placements hasardeux. Plus préoccupant encore, elle maintient sa confiance au dirigeant du groupe hôtelier, Olivier Carvin.

Devenu en quelques années seulement le cinquième groupe hôtelier français, Maranatha a financé une grande partie de ses acquisitions en collectant l'épargne de quelque 6 000 investisseurs particuliers et en faisant appel à des fonds d'investissement à qui il proposait de prendre des parts d’une soixantaine d'hôtels de standing, en France et à l'étranger.

Son ascension ultra-rapide a pris fin en septembre dernier. Le groupe dirigé par l'expert-comptable marseillais Olivier Carvin a été placé en redressement judiciaire dans une confusion préoccupante. Comme le relevait l'Autorité des marchés financiers (AMF) dans un courrier du 3 août, Maranatha est un écheveau incroyablement complexe de 101 sociétés, dont les commissaires aux comptes ont refusé de certifier les comptes pour 2015 et 2016 !

« Une des raisons du refus de certification est que Maranatha refusait d'inscrire à son bilan des engagements de rachat pris envers des institutionnels », commente l'avocat Philip Pechayre, du cabinet Goethe Avocats, représentant des particuliers floués. En résumé, pour lever des fonds, Maranatha a promis par écrit à des financiers de leur racheter leur part, avec une plus-value, quand ils le demanderaient. Le fond koweitien Cale Street, notamment, lui a prêté 275 millions d'euros pour acheter les hôtels du Roy, avec une promesse de 6 % de rendement sur deux ans.

Tout récemment, le 24 novembre 2017, Cale Street a obtenu en référé, du tribunal de commerce de Paris, de se faire payer les sommes qui lui revenaient. Comme le soulignaient eux-mêmes les avocats de Maranatha, cette décision, qui est exécutoire, aura « des conséquences catastrophiques pour le groupe », ainsi que pour les petits investisseurs. Il n'y aura peut-être pas d'argent pour rembourser tout le monde et le riche fond koweitien entend bien se servir en premier, comme les contrats signés par Olivier Carvin le lui permettent. Nul ne sait si la valeur actuelle des hôtels en question, achetés 362 millions d'euros en 2015, soit avant les attentats, sera suffisante pour laisser quelque chose aux investisseurs privés qui ont investi 100 millions d’euros pour compléter le prix, une fois que Cale Street aura été payé.

Plus grave encore, un mail dont Que Choisir a eu copie atteste qu’Olivier Carvin continuait à lever discrètement des fonds par l'intermédiaire de conseils en patrimoine en juin 2017, soi-disant pour prendre des parts dans l'hôtel Christiana, à Val d'Isère. Problème, à cette date, Maranatha devait près de dix millions d'euros à la station voisine de l'Alpe d'Huez, pour deux hôtels achetés mais jamais payés ! À ce stade, commente Philip Pechayre, « il revient à M. Carvin de nous rassurer en prouvant qu'il n'était pas dans un schéma de Ponzi », qui consiste à rémunérer les premiers investisseurs avec l'argent des suivants.

Jusqu’au 4 décembre pour déclarer sa créance

C'est dans ce contexte particulièrement troublé qu'apparaît l'Association de défense des investisseurs de Maranatha (Adefima). Ses statuts ont été déposés le 9 novembre à la préfecture de Marseille. Elle est représentée par Me Bertrand Haut de Sigy, du cabinet SBKG, qui a travaillé en 2014 au montage juridique de Bearing, la structure centrale du groupe Maranatha ! Me Haut de Sigy affirme que l'Adefima est totalement indépendante d'Olivier Carvin. Néanmoins, il considère que ce dernier a encore sa place dans l'avenir du groupe, « qu'il connaît mieux que personne ». L'Adefima, par ailleurs, accepte comme membres associés, avec un représentant au bureau, les conseils en gestion de patrimoine qui ont vendu les produits de placement Maranatha !

Dans ce dossier particulièrement complexe, il est préférable de se renseigner au plus vite auprès d'un avocat ou d'une structure totalement indépendante.

Erwan Seznec

Erwan Seznec

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