Réforme de la carte judiciaireContribution de l'UFC-Que Choisir
L'UFC-Que Choisir est favorable sur le principe d'une réforme de la carte judiciaire lancée le 26 juin 2007, pour instaurer une justice efficace et plus accessible.
Cette réforme doit être ambitieuse et ne pas se limiter à un simple redécoupage administratif des juridictions ou à une nouvelle répartition budgétaire.
Pour l'UFC-Que Choisir, elle doit être l'occasion d'instaurer un véritable service public de proximité pour les litiges de la vie quotidienne et de créer des pôles spécialisés modernisés pour les contentieux les plus techniques.
I) Un véritable service public de proximité
1) la justice doit rester une justice de proximité
La proximité géographique n'est à l'évidence pas synonyme d'une justice efficace. Elle reste cependant à notre sens essentielle car elle garantit l'existence d'un véritable service public de la justice.
Le lien entre le juge et le justiciable ne doit pas être distendu.
Les consommateurs justiciables sont en attente d'un service public de qualité et de proximité, compte tenu de la part croissante de la justice dans leur vie quotidienne.
Ils ont besoin d'un accès facile, rapide, simple et peu couteux aux tribunaux.
Nous assistons depuis plusieurs années au développement des contrats de masse dans tous les secteurs de l'économie (télécommunications, services financiers, pharmacie, grande distribution, énergies, pétrochimie...). Une masse d'individus isolés fait ainsi face à un nombre souvent restreint de grands producteurs ou distributeurs. Cette asymétrie est propice au développement de pratiques illicites ou abusives, au regard notamment du droit de la consommation et de la concurrence.
Il est donc indispensable que les consommateurs puissent demander aux tribunaux de jouer leur rôle de régulateurs et sanctionnent ces comportements.
Les modes alternatifs de règlement des litiges dans le domaine de la consommation existants ont démontré leur inefficacité et ne pourront dès lors jamais être des palliatifs au système judiciaire. L'accès au tribunal est le seul moyen efficace permettant au consommateur de faire valoir ses droits par l'effet réparateur et dissuasif attaché à la décision de justice.
La suppression de certaines structures judiciaires existantes pourrait être interprétée par les consommateurs comme une volonté de désengagement de la justice. L'implantation locale d'une juridiction incarne la réalité d'un service public accessible.
Elle conduirait à l'effet opposé de celui recherché.
L'institution judiciaire a récemment été ébranlée par différentes affaires qui ont conduit les citoyens à douter de la capacité de la justice à garantir le respect de leurs droits. L'éloignement géographique de la justice ne permettra pas de restaurer cette confiance.
Il serait à notre sens dangereux de se limiter à des critères quantitatifs (ratios de population et de contentieux) pour préparer cette réforme et de ne pas prendre en compte les éléments qualitatifs.
Cette nécessité de maintien d'une proximité géographique ne signifie pas qu'il faille à tout prix conserver toutes les structures existantes. Mais il nous parait indispensable de conserver des tribunaux d'instance indépendants.
Les tribunaux d'instance constituent les juridictions de proximité par excellence. Ces juridictions sont en effet proches géographiquement des justiciables et traitent des litiges de la vie quotidienne, notamment ceux liés à la consommation.
Compte tenu des contentieux qui relèvent de leurs compétences (crédit à la consommation, surendettement), ils participent au quotidien à la lutte contre l'exclusion sociale et permettent à chaque citoyen de comparaitre directement sans être obligé d'avoir recours à un avocat, ou à un huissier de justice.
Ces juridictions, de l'avis unanime, fonctionnent bien et permettent aux justiciables d'avoir facilement accès à une justice rapide.
La durée moyenne des procédures en 2004 est de 5 mois. Il convient de souligner concernant ces chiffres qu'il aurait été souhaitable à l'occasion de la réforme de la carte judiciaire d'avoir des chiffres plus récents sur l'activité judiciaire. En effet, l'annuaire statistique de la justice 2006, publié le 31 janvier 2007 sur le site www.justice.gouv.fr, ne traite que des années 2004 et 2005. Ceci étant, il est manifeste que les délais de traitement des litiges par les tribunaux d'instance restent relativement courts par rapport aux autres juridictions.
Il est par conséquent essentiel non seulement de maintenir les tribunaux d'instance mais aussi de renforcer leurs moyens humains et budgétaires afin d'assurer à chaque citoyen un accès rapide et aisé à un juge impartial et professionnel.
Le maintien de la structure actuelle nous parait indispensable. L'intégration des actuels tribunaux d'instance sous la forme de sections délocalisées au sein des tribunaux de grande instance comme certains l'envisage pourrait engendrer une perte d'efficacité de ces juridictions en raison de la lourdeur de fonctionnement que pourrait entrainer cette fusion.
En 1999, l'Italie a entrepris de réformer son système judiciaire à la suite de sa condamnation par la Cour Européenne des Doits de l'Homme pour la lenteur de sa justice. Cette réforme a entrainé la fusion entre l'équivalent de nos tribunaux d'instance et les tribunaux de grande instance. Cette réforme n'a cependant pas atteint son objectif puisque le bilan actuel fait état de délais de traitement des litiges qui ne cessent de s'allonger (1).
L'UFC-Que Choisir n'est pas pour autant opposée au regroupement de certains tribunaux d'instance qui n'ont pas une activité suffisante. Il apparaît, en effet, souhaitable d'optimiser les moyens humains et budgétaires.
Les éventuels regroupements ou redéploiements des juridictions doivent cependant avoir pour objectif le maintien d'une proximité. Il est dès lors nécessaire de prendre en compte les conditions démographiques et géographiques propres à certaines zones afin de s'assurer d'une accessibilité de ces tribunaux aux justiciables.
L'UFC-Que Choisir craint par ailleurs en cas d'intégration des tribunaux d'instance au sein des tribunaux de grande instance, une généralisation du ministère d'avocat.
Il est probable qu'une modification du ressort et de la compétence des juridictions entraine à terme un changement des règles d'accès à la justice et en particulier celles de la représentation en justice.
Plusieurs instances (Conférence des Bâtonniers et la Conférence Nationale des Barreaux) ont d'ailleurs suggéré dans leurs contributions respectives une généralisation de la représentation des justiciables par les avocats en toutes matières. Si cette obligation du ministère d'avocat peut être une contrepartie acceptable pour les représentants des avocats ou du monde judiciaire, de la réforme de la carte judiciaire elle est, à l'évidence, un marché de dupes pour les consommateurs.
Les conséquences de la réforme seraient une charge financière supplémentaire pour ces derniers.
L'UFC-Que Choisir considère qu'une telle mesure restreindrait l'accès des consommateurs à la justice.
L'UFC-Que Choisir propose afin de rendre la justice visible en un seul lieu et de simplifier l'implantation actuelle des différentes instances judiciaires de créer des tribunaux de proximité regroupant toutes les juridictions qui traitent des litiges de proximité :
- le tribunal d'instance
- les juges de proximité
- le conseil de prud'hommes
- le tribunal de commerce
- le tribunal des affaires de sécurité sociale
- le tribunal des baux ruraux.
Il serait également nécessaire au sein de ces structures de rendre le droit plus accessible en y intégrant un guichet unique baptisé « guichet d'accès aux juridictions ». Ce guichet permettrait au justiciable :
- d'avoir des informations générales afin de mieux connaitre et de faire valoir ses droits. Ces guichets iraient dans le sens d'un meilleur accès au droit, objectif à valeur constitutionnelle (2). La loi n° 98-1163 du 18 décembre 1998 a précisé la notion d'accès au droit (3) qui comporte : l'information générale des personnes sur leurs droits et obligations ainsi que leur orientation vers les organismes chargés de la mise en oeuvre de ces droits, l'aide dans l'accomplissement de toute démarche en vue de l'exercice d'un droit ou de l'exécution d'une obligation de nature juridique et l'assistance au cours des procédures non juridictionnelles, la consultation en matière juridique, l'assistance à la rédaction et à la conclusion des actes juridiques.
- de saisir les différentes juridictions composant le tribunal de proximité.
L'UFC-Que Choisir a pu constater lors d'une enquête réalisée sur les services de police et gendarmerie que dans les faits, cette information juridique est souvent dispensée par les gendarmes. Il serait plus cohérent d'instaurer ces guichets au sein de ces tribunaux de proximité afin que l'information juridique soit concentrée en un même point et soit délivrée par les personnes formées à cet effet.
L'instauration d'un service public passe par ailleurs par des magistrats professionnels.
2) Une justice de proximité efficace rendue par des professionnels du droit
L'UFC-Que Choisir souhaite que les consommateurs puissent bénéficier d'une justice de proximité rendue par des juges professionnels d'instance dotés d'une solide formation théorique et pratique. Ces conditions nous paraissent essentielles, compte tenu des incidences importantes sur la vie quotidienne des litiges du droit de la consommation.
Notre association s'est opposée dès l'origine à la création des juges de proximité en dénonçant l'instauration d'une justice à deux vitesses.
Comme nous l'avions indiqué à l'époque, il aurait été plus opportun de renforcer les moyens des juges d'instance pour conforter ces magistrats professionnels dans leur rôle de juge de proximité, au lieu d'envisager la création de structures nouvelles sans véritables moyens supplémentaires.
L'augmentation du taux de compétence des juges de proximité à hauteur de 4000 euros en 2005 a confié à des juges non professionnels la gestion de litiges qui portent sur des sommes conséquentes pour un particulier. Le consommateur n'a aucune garantie de voir son dossier traité en droit par le juge de proximité.
Nous avons de sérieuses réserves sur les compétences juridiques de ces juges. La durée actuelle de leur formation (une formation théorique de 12 jours et un stage en juridiction de 25 jours à 35 jours) est totalement inadaptée au regard de la complexité des affaires qui leur sont confiées. L'obligation de devoir former dans la plupart des cas un pourvoi en cassation pour contester une décision défavorable du juge de proximité constitue de plus un obstacle illégitime à la reconnaissance des droits des consommateurs.
Le rapport du groupe de travail créé par le Garde des Sceaux en novembre 2005 faisait état de 476 juges de proximité installés au lieu des 3300 envisagés. En janvier 2007, selon les chiffres communiqués par votre ministère, seuls 589 juges de proximité siégeaient.
Ces quelques éléments de bilan publics permettent de constater que peu de juges de proximité ont été recrutés ou que ceux en place quittent leur poste, faute de formation suffisante et ce malgré deux réformes venant aménager leur statut et leurs compétences.
En l'état actuel des informations en notre possession, il est manifeste que cette réforme est un échec. Le juge de proximité, tel qu'il existe actuellement hésite entre deux modèles : le modèle du juge non professionnel citoyen statuant en équité (auquel notre association est formellement opposée) et le modèle du juge professionnel statuant en droit et rattaché au juge d'instance.
La comparaison avec les autres pays européens démontre que les états membres qui ont pris l'option d'un juge de paix statuant en droit ont contrairement à la France développé la formation de ces juges.
Ainsi en Angleterre et au Pays de Galles, les juge de paix bénéficient d'une solide formation initiale et continue. En Belgique, les conditions d'expérience exigées sont plus fortes qu'en France.
La réforme de la carte judiciaire ne peut faire l'impasse d'une réflexion sur le devenir de cette institution. Elle ne doit pas conduire à la suppression des tribunaux d'instance pour laisser aux seuls juges de proximité non professionnels l'exercice de la justice de proximité.
Il nous semble par ailleurs tout aussi indispensable pour l'efficacité de cette réforme de repenser le rôle du juge dans le traitement des litiges de consommation.
Nous constatons à l'heure actuelle un détournement par les professionnels et les entreprises des procédures dites simplifiées devant le juge de proximité ou le juge d'instance.
Créées initialement pour permettre aux justiciables un accès plus simple au juge sans le recours à un avocat, ces procédures sont désormais utilisées en majorité par les professionnels (90 % selon Mme Pecaut-Rivolier ancienne Présidente de l'Association Nationale des Juges d'Instance) et notamment par les établissements financiers pour attraire devant les tribunaux les consommateurs en incident de paiement. Ceux-ci se voient donc conduits devant le tribunal sans moyen de défense ni connaissances juridiques suffisantes pour contester les demandes du professionnel.
Il est indispensable de donner au juge la possibilité de soulever d'office les dispositions du code de la consommation pour d'une part, rééquilibrer les rapports consommateurs et professionnels et d'autre part, assurer une réelle effectivité du droit de la consommation. Une telle évolution serait conforme à la jurisprudence de la Cour de justice de la communauté européenne. Ainsi dans son arrêt du 21 novembre 2002, la cour dispose que « pour assurer au consommateur une protection efficace et conforme aux objectifs d'une directive, le juge national doit pouvoir soulever d'office, les éléments de droit applicables. »
A côté de ces tribunaux de proximité, il nous semble indispensable d'instaurer des tribunaux de grande instance spécialisés plus performants permettant une augmentation des compétences et une amélioration du rendement des tribunaux par économie d'échelle. Il convient d'ailleurs de souligner que cette distinction entre « petits litiges » de la vie quotidienne et les contentieux techniques et spécialisés est commune à l'ensemble des pays européens.
En septembre 2000, lors de l'enquête lancée par la Commission des Communautés européennes sur les procédures applicables aux demandes de faible importance (« small claims court procédures »), sur les 14 états membres ayant répondu, 12 indiquent connaitre une dualité de juridictions civiles en première instance analogue à notre distinction tribunal d'instance et tribunal de grande instance.
II) Des tribunaux de grande instance spécialisés et modernisés
1) La spécialisation des Tribunaux de grande instance
L'UFC-Que Choisir estime qu'un regroupement des tribunaux de grande instance permettrait une spécialisation des juges qui assurerait une meilleure compétence des magistrats et par là même un renforcement de la sécurité juridique pour le justiciable.
Il serait ainsi également mis fin à l'isolement des jeunes magistrats souvent affectés à des « petits » tribunaux de grande instance.
Outre une amélioration de la qualité des décisions rendues, ce regroupement des tribunaux de grande instance permettrait une meilleure efficacité. La spécialisation des juges ajoutée au regroupement et à la rationalisation des moyens permettrait un raccourcissement des délais de prononcé des jugements qui demeurent importants pour ces juridictions (4) .
Il est vrai que cette spécialisation et ce regroupement peuvent éloigner géographiquement le justiciable de ces juridictions.
Cependant, si comme nous l'avons exposé précédemment, il doit être maintenu un pôle de proximité pour les litiges touchant le quotidien des consommateurs, pour les litiges plus techniques où le justiciable se déplace rarement du fait de la représentation obligatoire, l'éloignement géographique n'aurait pas le même impact.
Dans le domaine du contentieux familial, nous pensons que cet éloignement géographique pourrait être compensé par une compétence accrue des magistrats dans ce domaine particulièrement sensible.
Par ailleurs, de manière générale, il pourrait être remédié à cet éloignement par une gestion à distance des procédures par voie électronique.
2) Une modernisation de la gestion des procédures
L'UFC-Que Choisir est favorable à une généralisation de la numérisation et au développement de la gestion électronique des procédures.
Nous espérons que l'application du décret du 28 décembre 2005 qui prévoit le développement des moyens de communication pour toutes les juridictions en matière civile, dont l'entrée en vigueur est prévue pour le 1er janvier 2009, permettra cette modernisation.
Il est ainsi anachronique de constater que dans les procédures mettant aux prises des centaines de consommateurs contre un professionnel que ce soit au plan pénal ou civil, il est impossible de transmettre l'ensemble des pièces de procédures au tribunal par voie électronique.
Seules des copies papier de ces documents sont admises, ce qui peut représenter un volume très important.
Certains pays, comme l'Allemagne ont déjà instauré des registres électroniques permettant aux parties d'engager une procédure et d'en faire le suivi.
Cependant, cette modernisation ne doit pas avoir pour effet l'instauration d'une justice à deux vitesses. Le contentieux de masse, notamment celui du droit de la consommation doit rester à la portée de tous les justiciables, tout particulièrement ceux de conditions modestes, qui n'ont pas toujours accès aux nouvelles technologies.
Le développement de la possibilité d'accomplir des démarches en ligne doit s'accompagner de la mise à disposition de moyens matériels et techniques à l'usage de tous les consommateurs. Des bornes d'accès à internet permettant aux justiciables de suivre l'avancement de leur dossier devront ainsi être mises en place sur l'ensemble du territoire, par exemple au sein des point d'accès au droit envisagés précédemment.
Cette indispensable modernisation de la justice doit par ailleurs s'accompagner d'une modernisation de la gestion des instances permettant une rationalisation du traitement des litiges de masse. Elle passe par la création d'une nouvelle voie d'action : l'action de groupe.
3) La modernisation de la gestion des instances par l'instauration de l'action de groupe
Ainsi que nous l'avons précédemment indiqué, la réforme de la carte judiciaire ne peut faire l'impasse d'une réflexion sur les voies d'action en justice.
A l'évidence, malgré le développement des voies d'accès simplifiées au juge (saisine simplifiée, absence du ministère d'avocat devant le juge d'instance, l'instauration des juges de proximité) et l'incitation au développement des modes alternatifs de règlement des litiges, certains contentieux du droit de la consommation ne peuvent être soumis aux tribunaux en raison du nombre important de consommateurs concernés.
Il n'existe pas de procédures permettant à l'heure actuelle à des groupes de consommateurs de faire valoir dans une même instance leurs demandes. Les actions ouvertes aux associations de consommateurs dans l'intérêt collectif ne permettent pas d'obtenir réparation pour l'ensemble des victimes d'un même professionnel.
L'action en représentation conjointe, quant à elle, n'a jamais permis de surmonter les obstacles financiers, administratifs, organisationnels générés par la nécessité de constituer des dossiers individuels pour chaque consommateur souhaitant se joindre à l'action.
L'UFC-Que Choisir constate que les consommateurs individuellement n'agissent pas en justice parfois. L'action mobilise en effet du temps, de l'énergie et nécessite des frais importants. Dans les situations où la présence d'un avocat est impérative et/ou la production d'analyses techniques complexes s'avère nécessaire, le coût global de la procédure devient rédhibitoire (actions en réparation suite à des pratiques anticoncurrentielles ou dans le domaine financier).
Par exemple en 2000, le Conseil de la concurrence a condamné pour entente illicite plusieurs établissements bancaires pour avoir conclu un « pacte de non-agression » visant à empêcher les consommateurs de renégocier leurs prêts suite à la baisse importante des taux d'intérêts. Le Conseil avait estimé le préjudice global à plusieurs centaines de millions d'euros. Combien de clients de ces établissements ont engagé des procédures ?
En supposant même que toutes les conditions soient réunies pour que chaque victime ait un accès facile à la justice et la saisisse alors individuellement, le système judiciaire imploserait sous la masse des demandes. Les greffes ne sont à l'heure actuelle pas en mesure de gérer des procédures comprenant quelques centaines de demandes individuelles. Par exemple, dans notre procédure cartel mobile, nous avons du déposer les dossiers des 12 521 personnes qui se sont jointes à notre action sous forme papier au tribunal et aux avocats adverses = 3 m3 de dossiers papier.
Les «victimes» ressentent une frustration et un sentiment d'injustice indéniable. Selon un sondage CSA récent (Sondage réalisé les 28 et 29 mars 2007, à l'initiative de la CLCV et de l'UFC-Que Choisir, associations de défense de consommateurs françaises, sur un échantillon national représentatif de 1003 personnes âgées de 18 ans et plus), 84 % des français sont favorables à l'introduction d'une action de groupe en France et 57 % jugent cette réforme prioritaire. Plus de 100.000 personnes, dont 210 parlementaires et près de 200 chefs d'entreprise ont par ailleurs signé une pétition demandant la création de cette procédure sur le site Internet www.ensemblenjustice.org.
Il nous semble dès lors indispensable de saisir l'occasion de cette réforme pour créer une procédure adaptée aux litiges de masse.
En conclusion, quel que soient les décisions à venir, l'essentiel pour l'UFC-Que Choisir est que les changements aillent dans un seul sens : la justice doit être mise au service du justiciable et non l'inverse.
A l'évidence, le justiciable ne doit pas supporter le coût de cette réforme. Il appartient à l'Etat de consacrer les moyens budgétaires suffisants à sa mise en oeuvre. Le projet de loi de finances pour l'année 2008 laisse cependant dubitatif sur ce point.
(1) Selon le Ministère de la justice italien, les analyses statistiques relatives à la justice civile pour les années 2004-2005 et le 1er semestre 2006 font état d'un temps d'attente en augmentation pour obtenir une décision. La cour d'appel et le tribunal de première instance sont les juridictions qui présentent le plus gros temps d'attente (de 4 mois à 44 mois selon la matière jugée).
(2) Par la Décision n°99-421 DC du 16 décembre 1999, le Conseil a reconnu valeur constitutionnelle à l'objectif consistant à rendre la loi plus accessible et plus intelligible, de manière à en faciliter la connaissance par les citoyens.
(3) Telle qu'elle figurait à l'article 53 la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
(4) Selon l'annuaire statistique de la justice 2006, la durée moyenne des procédures au fond est passée de 8, 6 mois en 2000 à 9,6 mois en 2004. La durée moyenne des procédures en référé est passée de 1, 3 mois en 2000 à 1, 8 mois en 2004.