Prescriptions de médicamentsLe gâchis encore et toujours
Les résultats de notre nouvelle étude confirment l'irrationalité des prescriptions de médicaments en ville, déjà constatée dans une étude diffusée au mois de septembre : les médecins ne prescrivent pas toujours les médicaments les moins chers, voire même les plus efficaces.
Au total, sur seulement 5 classes de médicaments (14 % des prescriptions de ville) et à qualité de soins au moins équivalente, 1 milliard d'euros aurait pu être économisé de 2002 à 2006, soit 200 millions par an.
Concernant les antiagrégants plaquettaires, utilisés dans la prévention ou les suites d'un accident cardio-vasculaire, (459 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2006), la forte progression des dépenses de cette classe (+ 88 % de 2002 à 2006) est principalement le fait d'un médicament, le Plavix®. Or, dans un nombre de cas important, l'aspirine à faible dose - 27 fois moins chère - devrait être substituée au Plavix®. Par exemple, les autorités de santé ont constaté que, pour l'année 2002, la moitié des traitements au Plavix® relevait du mésusage.
A qualité de soin équivalente, c'est une économie de 350 millions d'euros qui aurait pu être réalisée sur la période 2002-2006, soit 70 millions d'euros par an.
Ce surcoût vient s'ajouter aux 660 millions d'euros de gâchis constatés sur les prescriptions de ville de 2002 à 2006 (132 millions par an) dans le traitement de maladies telles que les reflux gastro-oesophagiens, l'arthrose et l'hypertension.
Ces résultats font écho au constat sans appel récemment dressé par la Cour des Comptes puis par l'Inspection Générale des Affaires Sociales (IGAS). Il apparait notamment que la prescription est trop largement influencée par l'industrie pharmaceutique et qu'elle oriente la prescription des médecins.
La pression de la visite médicale des laboratoires sur les médecins est ainsi plus élevée en France que dans les autres pays européens : on compte en France 1 visiteur médical pour 9 médecins libéraux, soit deux fois plus qu'en Angleterre ou en Allemagne et quatre fois plus qu'aux Pays-Bas.
L'UFC-Que Choisir estime inconcevable que le ministère de la Santé ne prenne pas la mesure de ces deux grands rapports publics et n'envisage pas une réforme profonde de la politique du médicament.
Dans cette perspective, l'UFC-Que Choisir propose de rééquilibrer l'information des médecins selon une logique simple : développer l'information objective des praticiens par les pouvoirs publics et contraindre le bombardement promotionnel éminemment subjectif des laboratoires pharmaceutiques. Le développement de l'information publique passe par la création de visiteurs médicaux sous l'égide de la Haute Autorité de Santé. Nous suggérons la mise en place de 1700 visiteurs médicaux publics dont le coût annuel est estimé à 200 millions d'euros, et qui pourrait être financé par la taxe sur les laboratoires pharmaceutiques. Le « désarmement promotionnel » des laboratoires pharmaceutiques nécessite de renforcer deux outils existants : augmenter la taxe sur la promotion des produits pharmaceutiques et, pour les classes les plus problématiques, imposer des diminutions du volume des visites médicales.