Opérations déprogrammées en raison de la crise sanitaireLe privé doit être mis à contribution
Un an après une première enquête montrant l’ampleur des déprogrammations d’opérations lors de la première vague de Covid, l’UFC-Que Choisir dresse un nouveau bilan de la situation qui souligne la persistance du phénomène. Compte tenu des graves effets des déprogrammations sur la santé des patients, l’UFC-Que Choisir appelle le ministre de la Santé ainsi que les agences régionales de santé à mettre en place urgemment un dispositif en mesure d’assurer la prise en charge de tous dans les meilleurs délais.
Un retard de prise en charge loin d’être rattrapé après une année de crise sanitaire
Alors que la surprise de la première vague de Covid et la nécessité de prendre en charge les patients étant infectés avaient abouti à ce que 74 % des opérations initialement prévues en mars et avril 2020 soient déprogrammées (1), une nouvelle enquête (2) de l’UFC-Que Choisir montre que la situation est loin de s’être résorbée. En effet, 39 % des opérations prévues entre mars 2020 et mars 2021 n’avaient toujours pas eu lieu en avril 2021, dont 27 % qui n’avaient fait l’objet d’aucune reprogrammation. Quant aux opérations reprogrammées mais pas encore effectuées, il est à craindre que les nouveaux rendez-vous – en moyenne placés 7 mois après la date initiale – ne soient pas tous honorés. En effet, un quart des patients interrogés et ayant eu à subir une déprogrammation ont vu leur opération reportée à au moins deux reprises.
Des conséquences négatives pour huit patients sur dix
La persistance des retards de prises en charge est d’autant plus inquiétante que dans 81 % des cas, ils ont occasionné des conséquences négatives pour les patients. Au-delà des angoisses et du stress, 20 % des répondants soulignent que la déprogrammation de leur opération a eu pour effet d’aggraver leur problème de santé et 5 % pointent un retard dans le dépistage d’une maladie. Pire, ces aggravations concernent très souvent des pathologies lourdes : la moitié des opérations déprogrammées justifiaient une hospitalisation complète. En outre, une récente étude (3) montre que l’activité de transplantation rénale a chuté de 30 % en 2020.
Des mesures exceptionnelles tardent toujours à être prises
Le choix de transférer des patients covid dans les hôpitaux publics d’autres régions, au détriment des places encore disponibles dans les cliniques privées, a pu interroger sur les capacités de coopération entre privé et public au cours de la seconde vague (4). En réalité, il découle d’une progressive spécialisation du public dans l’accueil des patients atteints de covid : les hôpitaux publics ont assuré jusqu’à 88 % des prises en charge depuis le début de la seconde vague de covid, davantage qu’au cours de la première vague (5).
Afin de rattraper rapidement les retards de soins liés aux déprogrammations massives, il est nécessaire de prendre en compte les spécificités de chaque secteur pour aboutir à une répartition efficiente des tâches entre public et privé. Puisque le secteur public semble mieux adapté à l’accueil des cas covid, il est urgent de mettre à contribution les capacités des établissements privés dans la prise en charge des opérations déprogrammées. Un travail de coordination doit être mené, à même d’orienter les usagers vers l’ensemble des places disponibles.
Alors que les déprogrammations d’opérations persistent plus d’un an après le début de la crise sanitaire, et en raison de l’approche de la période estivale qui limitera les capacités hospitalières, l’UFC-Que Choisir demande aux autorités sanitaires, et plus particulièrement aux Agences régionales de santé :
- De veiller à ce que l’ensemble des places disponibles dans les établissements de soins soient utilisées de manière à rapidement combler le retard pris ;
- De favoriser la mise à contribution du secteur privé dans la prise en charge des opérations déprogrammées, sans surcoût pour les usagers.
(2) Enquête en ligne réalisée du 7 au 20 avril 2021 – 844 répondants
(3) Cf. Étude FHF (Fédération Hospitalière de France) data sur les séjours COVID et les conséquences d’une saturation de l’hôpital et des réanimations – Atelier presse 30 mars 2021
(4) À titre d’illustration, le président de la fédération régionale de l’hospitalisation privée s’était étonné en octobre 2020 du fait que "le CHU de Nîmes maintienne ses transferts hors de la région alors qu’à Nîmes, la Polyclinique Grand Sud et les Franciscaines, alertées en cellule de crise, ont augmenté leurs capacités de réanimation".
(5) Cf. étude FHF