Factures énergétiquesL’UFC-Que Choisir dénonce un faux « bouclier tarifaire »
Alors que l’explosion actuelle du tarif réglementé de gaz et celle anticipée pour début 2022 du tarif réglementé de vente de l’électricité appelaient des mesures claires, fortes et pérennes du Premier ministre pour rendre du pouvoir d’achat aux consommateurs, l’UFC-Que Choisir déplore ses annonces tantôt lacunaires, tantôt faussement protectrices. Prenant acte de l’inquiétante incapacité de l’exécutif à mobiliser les meilleurs leviers pour faire durablement baisser les factures énergétiques, l’association appelle les parlementaires à actionner dans le projet de loi de finances 2022 le levier de la TVA sur la consommation de gaz et d’électricité, et à voter la fin de l’aberration fiscale que constitue l’application de la TVA sur les taxes énergétiques.
Tarifs du gaz : reculer pour mieux payer !
L’annonce d’un gel des prix du tarif réglementé de vente de gaz (TRVG) ne constitue en rien une mesure protectrice du pouvoir d’achat des consommateurs. En effet, si d’ici le printemps prochain les tarifs du TRGV resteront figés au haut niveau actuel, le « lissage » des prix évoqué par le Premier ministre imposera en réalité aux consommateurs de payer par la suite, à une période sans risque électoral, ce qui ne l’aura pas été d’ici-là. Autrement dit, au global les consommateurs ne tireront aucun bénéfice d’un gel des tarifs, ils paieront la note. Le gel des tarifs, le bien mal nommé « bouclier tarifaire », ne trompe personne. Il correspond en réalité à un gel du pouvoir d’achat, dont on ne comprend pas comment le gouvernement pourrait sérieusement se vanter.
Comment se satisfaire de cette annonce qui n’aura trompé aucun consommateur, alors que la seule mobilisation de deux leviers fiscaux, à savoir la baisse de la TVA sur la consommation de 20 % à 5,5 % et la fin de l’application de la TVA sur les taxes frappant spécifiquement le gaz aurait eu pour effet concret de faire baisser la facture annuelle d’un ménage chauffé au gaz de l’ordre de 230 €(1) ?
Tarifs de l’électricité : le gouvernement fait primer les intérêts d’EDF sur ceux des consommateurs
Alors que sur la base d’hypothèses prudentes l’UFC-Que Choisir avait établi (2) que le tarif réglementé de vente d’électricité (TRVE) augmenterait de 10 % début 2022 si rien n’était fait, l’explosion des prix de l’électricité sur le marché international ces derniers jours (3) aurait pu en réalité aboutir à une hausse de 15 % des factures sans action du gouvernement. Dès lors, l’engagement du Premier ministre de plafonner la hausse du TRVE à 4 % via la modulation de la Taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (la TICFE, qui aujourd’hui représente 13 % de la facture) constitue à l’évidence un moindre mal.
Cela étant, outre le fait de montrer par l’exemple que l’utilisation de l’arme fiscale aurait parfaitement pu être prise pour faire baisser le prix du gaz (4), cette mesure, dont rien ne garantit qu’elle soit pérennisée, ne permet pas de mettre un coup d’arrêt à la spirale inflationniste des prix de l’électricité qui ont augmenté de 50 % au cours des 10 dernières années (5), alors que cet objectif aurait parfaitement pu être réalisé en cas de modification de la régulation française du secteur.
En ne modifiant pas le plafond de l’ARENH comme le demande l’UFC-Que Choisir depuis plus de deux ans et comme le permet la loi, le gouvernement acte son choix de ne pas faire pleinement bénéficier les consommateurs de la compétitivité du parc électronucléaire, dont ils ont pourtant financé le déploiement, pour permettre à EDF de vendre chèrement son électricité sur les marchés internationaux. Compte tenu des prix actuels sur ces marchés et le prix de l’ARENH (6), censé refléter les coûts de production du nucléaire, c’est une potentielle plus-value de l’ordre de 4 milliards d’euros que réalise EDF, sur le dos des consommateurs !
Les ersatz de solutions avancées par le gouvernement montrant son aveuglement quant aux problématiques énergétiques rencontrées par les consommateurs, l’UFC-Que Choisir demande aux parlementaires de voter dans le cadre de la loi de finances 2022 :
- La baisse de la TVA sur la consommation de gaz et d’électricité a minima jusqu’à un retour à la normale des prix du gaz et de l’électricité sur les marchés internationaux ;
- La fin de l’aberration fiscale que constitue l’application de la TVA sur les taxes énergétiques qui permet à l’État de ponctionner les consommateurs à hauteur de 4,6 milliards d’euros par an.
De plus, compte tenu de l’actuelle exposition artificielle des factures d’électricité des consommateurs aux marchés internationaux sous l’effet d’une politique délibérée de l’exécutif, l’UFC-Que Choisir interpellera les candidats à l’élection présidentielle pour qu’ils se positionnent sur le sujet.
(1) Estimation de l’UFC-Que Choisir en prenant en compte l’effet de ces mesures fiscales pour un ménage chauffé au gaz en intégrant à la fois la facture de gaz, et la facture d’électricité. Le montant de la facture de gaz prise en compte intègre la hausse « théorique » de 30 % d’ici à la fin de l’année annoncée, puisqu’elle sera effectivement payée par les consommateurs dans le cadre du lissage.
(3) Pour nos calculs nous prenions pour hypothèse un prix moyen de 100 €/MWh sur le marché de gros d’ici à la fin de l’année. Notre nouvelle estimation pose comme hypothèse un prix moyen de 130 €/MWh d’ici à la fin de l’année, étant entendu qu’elle reste toujours prudente, le prix ayant atteint plus de 135 €/MWh hier sur le marché de gros.
(4) En baissant notamment la Taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel (TICGN).
(6) 42 €/MWh.