Halte aux chiffons rouges contre la résiliation à tout moment
Alors que le gouvernement veut autoriser la résiliation à tout moment des contrats de complémentaire santé, les organismes assureurs sortent l’artillerie lourde contre cette mesure. Il est pourtant inacceptable que, dans un contexte de flambée des cotisations, les consommateurs soient entravés lorsqu’ils souhaitent légitimement changer de couverture. C’est pourquoi l’UFC–Que Choisir, pour qui la liberté ne s’oppose pas à la solidarité, appelle les Sénateurs à adopter, dans le cadre de la loi PACTE, cette mesure salutaire pour la santé et le pouvoir d’achat des usagers.
Une réponse à l’envolée des tarifs… et des frais de gestion
Si la liberté de pouvoir choisir son assurance santé à tout moment est si importante, c’est que les consommateurs subissent une inflation impressionnante de leurs cotisations, qui ont augmenté de plus de 50 % depuis 2006. Si cette inflation s’explique en partie par l’augmentation des dépenses de santé, il n’est pas acceptable que les frais de gestion des organismes complémentaires dérivent en parallèle. Ainsi, depuis 2010, les frais ont progressé deux fois plus vite que les remboursements aux assurés ! Dès lors, libérer les consommateurs des contraintes de l’engagement leur permettra de faire jouer la concurrence et ainsi de promouvoir les contrats les plus vertueux et les mieux adaptés à leurs besoins.
La liberté de résilier n’est pas l’ennemie de la solidarité entre assurés
La perspective de cette mesure, annoncée par le président de la République le mois dernier, a amené certains organismes assureurs à menacer le marché des Dix Plaies d’Egypte : elle remettrait en particulier en cause la solidarité entre assurés. Si cette fébrilité semble témoigner du peu de confiance des assureurs dans leur capacité à conserver leurs assurés autrement que par la contrainte, elle repose surtout sur un raisonnement erroné. Les logiques d’individualisation du risque santé (principalement en fonction de l’âge) ont en effet été généralisées alors même que la résiliation était contrainte. La liberté de choix ne changera rien à cette dynamique, et conservera la logique de solidarité entre assurés malades et bien portants, à l’œuvre aujourd’hui.
Au contraire, la résiliation est même une protection pour certains consommateurs victimes du démarchage. Un récent rapport de l’Autorité de contrôle prudentiel et de l’Autorité des marchés financiers1 a mis en lumière l’ampleur de ces pratiques, particulièrement pour les personnes âgées – des tendances qui se retrouvent dans les litiges traités par nos associations locales. Les consommateurs démarchés peuvent alors se retrouver avec une double-couverture, et donc une double-cotisation. Permettre de résilier l’un des deux contrats, c’est mettre fin à une anomalie.
Une pierre fondamentale d’un plus vaste édifice pour contenir les coûts
Si la résiliation facilitée est une avancée majeure, elle n’est pas à elle-seule suffisante pour enclencher une dynamique concurrentielle. Sans possibilité de comparer, il n’est point de réelle liberté de choix. C’est pourquoi il est plus que jamais nécessaire d’améliorer sensiblement la lisibilité des garanties santé, au-delà des maigres engagements de 2018. De même, rendre obligatoire une information sur le taux de redistribution de chaque organisme, c’est-à-dire la part des cotisations qui est retournée vers la communauté des assurés, contribuerait à assainir le marché.
Par ailleurs, la baisse des tarifs est aussi liée à une maîtrise des dépenses de soins. En ce sens, le gouvernement doit agir pour réguler les dépassements d’honoraires des médecins et des dentistes, ainsi que le prix des lunettes et des audioprothèses, postes de dépenses qui pèsent lourd dans les cotisations.
Pour permettre de contenir enfin les cotisations, l’UFC–Que Choisir demande aux Sénateurs d’adopter, dans la loi PACTE, la résiliation à tout moment de l’assurance santé. L’association appelle par ailleurs le gouvernement à une action résolue sur la comparabilité des contrats et à la maîtrise des tarifs des professionnels de santé.
1 Rapport AMF-ACPR sur les pratiques de commercialisation à destination des populations vieillissantes, décembre 2018