Alain Bazot
Président de l'UFC-Que Choisir
Un peu plus d’un an après le barnum médiatique autour du lancement du service d’aide à la mobilité bancaire, le Comité consultatif du secteur financier (CCSF) a rendu public aujourd’hui un bilan/sondage étonnamment flatteur de ce dispositif. Si ses résultats peuvent sembler satisfaisants aux commentateurs non avertis, je n’y vois, entre les lignes, que la confirmation des lacunes d’un pis-aller, impuissant à lever les freins à la concurrence sur le secteur bancaire.
Dans un contexte où les tarifs bancaires progressent à un rythme trois fois plus rapide que l’inflation depuis 2013 (9% contre 3%), je suis frappé de constater que le bilan du CCSF s’accommode dans l’indifférence d’un niveau de mobilité bancaire famélique. Au 6 février 2018, soit un an après le lancement du nouveau dispositif instauré par la loi Macron, la profession a enregistré seulement 1,2 million de demandes de mandat. Rapporté au nombre de comptes bancaires et en comptabilisant les transferts réalisés hors dispositif, le taux d’attrition du secteur atteindrait seulement 2,3% (1), un niveau toujours près de quatre fois inférieur à celui de nos voisins européens !
Revenons au sondage. Alors que plus d’un consommateur sur cinq (22%) a souhaité changer de banque au cours de l’année écoulée, il est frappant de constater que plus des trois quarts de ces derniers (76%) n’ont pas osé franchir le Rubicon (2). Comment expliquer cette déperdition ? Outre les clients qui n’ont pas su quel établissement choisir (44%), ce qui devrait grandement inquiéter les professionnels à l’heure de la désintermédiation bancaire, un peu plus de quatre sondés sur dix (43%) se résignent compte tenu des risques liés au changement. Comment leur donner tort alors que 38% des bénéficiaires du service d’aide à la mobilité bancaire ont connu des anomalies lors du transfert des opérations récurrentes (virements et prélèvements) vers leur nouveau compte ?
Face à l’ampleur de ces dysfonctionnements, dont nous nous étions fait l’écho en septembre 2017, je ne peux que regretter que les professionnels n’aient pas joué le jeu de la transparence pour répondre à nos demandes d’explications formulées lors des travaux préparatoires à ce bilan. Quelles circonstances ont pu motiver des refus de mandat de mobilité bancaire ? Combien d’incidents ont été identifiés sur des comptes faisant l’objet d’une mobilité ? Parmi ces derniers, dans quelle proportion ces incidents ont été indemnisés aux consommateurs ?
Alors que la Place n’a pas manqué de se réjouir des taux de recommandation et de satisfaction très élevés du service (respectivement 92% et 85%), vous comprendrez bien que sans alternative plus sûre et plus simple, telle que la portabilité du numéro de compte bancaire, ces chiffres me paraissent anecdotiques.
A l’inverse, j’attends des parlementaires qu’ils apportent à l’occasion de l’examen de la loi Pacte des solutions aux freins les puissants à la mobilité bancaire, en particulier la domiciliation des revenus dans le cadre du crédit immobilier et le coût des transferts des produits d’épargne.
Alain Bazot
Président de l'UFC-Que Choisir
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