Erwan Seznec
Assurance emprunteurLa gaffe du Crédit agricole de Toulouse
Beaucoup de banques donnent consigne à leurs salariés d’imposer de manière illégale une assurance emprunteur aux clients qui souscrivent un crédit immobilier. Mais rares sont celles qui ont l’imprudence de le faire par écrit.
Adoptée en 2010, la loi Lagarde interdit à une banque de majorer le taux de crédit si l’emprunteur refuse de souscrire l’assurance décès invalidité (ADI) que lui propose l’établissement. Tous les spécialistes en conviennent, les banques respectent mal cette disposition. L’UFC-Que Choisir a d’ailleurs encore récemment dénoncé cette pratique. Il est néanmoins difficile de prendre les banques sur le fait, car bien entendu, elles n’ont pas la naïveté de poser par écrit leur conditions illégales.
Enfin, sauf la caisse du Crédit agricole de Toulouse... Le document reproduit ci-dessous a été distribué à une centaine d’apporteurs d’affaires indépendants. Pour ceux qui risquaient de la rater, la mention illégale a été écrite en majuscule et surlignée en rouge : « Si au moins une condition non remplie : + 0,10 » de hausse du taux d’intérêt. Et dans les conditions, se trouve l’« ADI obligatoire ». Y figure aussi, d’ailleurs, la souscription d’une MRH, c’est-à-dire d’une multirisque habitation. Double entorse à la loi. Le Crédit agricole de Toulouse, contacté, soutient qu’il respecte la loi Lagarde mais que le document « prête à confusion »… Il devrait être corrigé bientôt par une nouvelle circulaire.
Des obligations mais pas de sanction
Le vrai scandale, toutefois, est que le Crédit agricole de Toulouse ne risque absolument rien dans cette affaire. La loi Lagarde, en effet, a posé des obligations sans prévoir de sanction. Partant sans doute de l’idée que les états-majors des banques sont exclusivement peuplés de gentlemen, le législateur compte sur le simple fair-play pour qu’elles n’abusent pas de leur position de force face aux clients. Ce qui pourrait expliquer pourquoi si peu d’entre eux parviennent à faire jouer la concurrence en ce qui concerne l’assurance emprunteur. Le Parlement va réexaminer la question en décembre. L’Inspection générale des finances lui prépare le travail. Elle planche en ce moment à un rapport sur les moyens d’ouvrir davantage à la concurrence ce marché de près de six milliards d’euros annuels. Un premier pas serait peut-être de prendre les banques pour ce qu’elles sont : des institutions respectables mais à but lucratif, qui s’engouffrent, sans surprise, dans les failles de la réglementation.
Le document émanant de la caisse du Crédit agricole de Toulouse