Anne-Sophie Stamane
VéloPlus de tués ou de blessés chez les cyclistes casqués
Tout cycliste s’est un jour posé la question de porter ou non un casque. Une étude qui circule depuis 2021 montre une surmortalité paradoxale des cyclistes casqués. Mais selon les hypothèses posées, plus que le casque, le type de pratique – sportive ou débutante – serait en cause, car elle est plus ou moins génératrice d’accidents.
À vélo, le casque protège des traumatismes crâniens et des blessures à la tête : l’affaire est entendue, il n’y a plus débat. À condition qu’il soit correctement porté, ça va sans dire. Mais alors, pourquoi, selon une étude présentée lors des 3es Rencontres francophones transport mobilité en juin 2021, constate-t-on une « surmortalité des cyclistes casqués en agglomération » ?
Avant d’examiner les raisons possibles d’un tel paradoxe, un retour sur les statistiques s’impose. C’est en étudiant la base des bulletins d’analyse des accidents corporels de la circulation routière (BAAC), entre 2016 et 2019, que les auteurs ont pu isoler, d’un côté, la part des cyclistes casqués dans le total des cyclistes tués, et de l’autre, le taux global de cyclistes portant un casque. Seules les données en agglomération ont été retenues, car le port du casque hors agglomération n’est pas précisément connu. Dans ce cadre, et sachant le rôle protecteur du casque, le chiffre des tués casqués aurait dû être inférieur ou, au pire, égal à la part de casqués dans la population cycliste. Or il n’en est rien. C’est même l’inverse : les cyclistes casqués représentent 47 % des tués, alors qu’ils ne sont que 22 % des cyclistes. Avec un casque, un cycliste a 3 fois plus de risques d’avoir un accident mortel qu’un cycliste non casqué.
La protection apportée par le casque n’étant pas contestable, comment justifier ces résultats surprenants ? Au-delà des calculs, l’étude pose quelques hypothèses, qui restent à confirmer. « Il nous paraît certain qu’il y a une corrélation nette entre la décision de mettre un casque et une pratique à risques réels ou supposés », soulignent les auteurs. Or il existe bien 3 catégories de cyclistes présentant des facteurs de risque qui, à raison, portent plus souvent un casque : les cyclistes sportifs, rendus vulnérables par leur équipement peu adapté à la ville, par leur vitesse et, parfois, par leur âge ; les débutants, qui n’ont pas l’agilité de déplacement des cyclistes expérimentés et commettent souvent des erreurs, comme rouler très près du bord de la route ; enfin, les « vélotaffeurs » de banlieue, exposés à des conditions de circulation dangereuses et ne bénéficiant pas de la sécurité du nombre.
Moins conscient des dangers
Mais ces pistes ne semblent pas suffisantes pour expliquer un tel surrisque. Une autre raison pourrait compléter le tableau, à savoir un phénomène d’indifférence au risque lié au port du casque. En clair, se sentant protégé, un cycliste équipé serait moins conscient des dangers qui l’entourent et donc, moins vigilant. Prouvée en conditions expérimentales, l’indifférence au risque ne l’a pas encore été en conditions réelles. Mais elle pourrait être renforcée par les campagnes de communication liant la sécurité des cyclistes au seul port du casque. Or celle-ci dépend de bien d’autres facteurs : la présence de pistes cyclables, le respect du Code de la route, le comportement et la vitesse des usagers motorisés, la visibilité, le bon fonctionnement du vélo, etc. En somme, la mauvaise habitude de surestimer la protection apportée par le casque à vélo serait préjudiciable aux cyclistes !