Élisa Oudin
SyndicsLe contrat type hors la loi
Plusieurs dizaines de clauses illicites ou abusives dans le contrat de syndic proposé comme modèle par la Fnaim (Fédération nationale de l'immobilier) : c'est le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Grenoble le 2 novembre dernier. De quoi justifier plus que jamais un arrêté du ministère du Logement pour mettre enfin un peu plus de transparence et de sécurité dans ces contrats imposés aux copropriétaires.
Saisi par une plainte de l'UFC-Que Choisir de l'Isère, le tribunal de grande instance de Grenoble a condamné la société Boyer Torrollion, syndic de copropriété, en raison des très nombreuses clauses illicites et abusives présentes dans son contrat. Celui-ci s'inspire directement des modèles de contrat de syndic élaborés par la Fédération nationale de l'immobilier (Fnaim) en 2005 et 2008.
Ce jugement s'avère plus qu'instructif, car il permet de mieux déterminer les obligations des syndics, et notamment la liste des tâches qui leur incombent sans que ceux-ci puissent facturer d'honoraires supplémentaires aux copropriétaires. Ne peuvent ainsi faire l'objet de surcoût, selon le tribunal, les prestations suivantes : travaux exécutés d'urgence, frais administratifs (notamment photocopies) hors frais d'affranchissement, mise à jour et mise à disposition du carnet d'entretien, constatation et déclaration d'un sinistre, gestion des diagnostics obligatoires, gestion des contrats d'entretien d'équipements nouveaux, réception par le syndic des membres du conseil syndical, devis des travaux votés hors budget, etc.
Celles-ci relèvent en effet de la gestion courante (et sont donc rémunérées dans le forfait de base) et non de prestations particulières. Pour distinguer entre les deux, le tribunal rappelle que ne peuvent être considérées comme des prestations particulières les tâches certaines ou suffisamment prévisibles.
À noter que le tribunal a également considéré comme illicites ou abusives les clauses suivantes : le droit pour le syndic de mettre fin à ses fonctions à tout moment à condition de respecter un préavis de 3 mois (alors qu'il doit selon la loi convoquer une assemblée générale pour notifier sa démission), le versement des fonds des copropriétaires sur un compte au nom du syndic (alors que la décision d'un compte commun ou séparé doit être adoptée en assemblée générale), ainsi que les clauses étrangères au contrat (rémunération pour mise en location de parties communes, intervention du syndic pour des travaux à la demande d'un copropriétaire, aides aux déclarations fiscales des copropriétaires), etc.
Urgence d'un décret
Ce jugement montre, s'il en était besoin, les insuffisances de l'avis du Conseil national de la consommation du 27 septembre 2007. En effet, les professionnels affirment dans leur majorité avoir mis en conformité leurs contrats avec cet avis... Cela n'empêche pas les nombreuses clauses illicites et abusives de fleurir, jusque dans les contrats types. Comme le rappellent six associations de consommateurs, dont l'UFC Que-Choisir, dans un communiqué commun du 17 décembre 2009, seule l'adoption par le ministre de la Consommation d'un arrêté permettrait d'interdire les pratiques tarifaires abusives des syndics, et tout particulièrement de limiter la part des honoraires hors forfait annuel.