Elsa Casalegno
Soda alcoolisé SnowmeltDes affichages sauvages pour s’affranchir de la loi
Des affiches pour la boisson gazeuse alcoolisée Snowmelt fleurissent sur les murs de plusieurs quartiers de Paris. Une campagne publicitaire problématique à plusieurs titres.
Depuis quelques semaines, des publicités pour la boisson Snowmelt s’affichent sur des murs d’immeubles dans les quartiers branchés de la capitale. Ce produit est un hard seltzer, une boisson gazeuse, aromatisée et alcoolisée qui fait fureur outre-Atlantique depuis deux ans. Cette marque, fabriquée par une brasserie américaine, se dispute le marché avec d’autres petits fabricants, mais aussi avec des multinationales de la bière et des sodas. Mais dans sa conquête du marché français, elle en oublie la réglementation…
Un soda « low alcohol » pas si faible en alcool
Dans sa campagne publicitaire, « Snowmelt se joue de la loi Évin (1), avec un marketing insidieux qui minimise les risques liés à la consommation d’alcool, et en le présentant comme un produit "healthy" [bon pour la santé, ndlr], alors que cette boisson titre autant qu’une bière à 5,5 % », explique Franck Lecas, de l’association Addictions France. Le message de Snowmelt est donc trompeur quand il affirme « low alcohol » ‒ peu alcoolisé ‒ alors que ces hard seltzers contiennent autant d’alcool qu’une bière. Le fait de l’accoler à « low calories/low sugar » (pauvre en calories et en sucre) renforce cette fausse sensation d’innocuité. « Or, le message que doivent retenir les consommateurs, c’est que l’alcool est dangereux pour la santé, complète Franck Lecas. Ici, le panneau qui le rappelle est en noir, et on le croirait séparé de la publicité. Quoi qu’il en soit, les différentes assertions en atténuent considérablement la portée. » Pour le moins ambivalente, la campagne semble effectivement encourager à reprendre la consommation, certes « slowly » – lentement ‒ mais à reprendre tout de même.
Pourtant la loi Évin est claire : aucune incitation explicite à boire de l’alcool n’est autorisée, encore moins hors des panneaux publicitaires. Et la publicité doit se limiter à présenter le produit de façon purement informative. Un assouplissement récent (rédigé pour les vins mais qui ne s’applique pas aux hard seltzers) autorise seulement des références au terroir, aux signes de qualité officiels (AOP, IGP), ou des références objectives à la couleur ou au goût.
Un affichage sauvage… organisé par une agence
Cette campagne de Snowmelt se donne des airs de marque alternative hors système. Mais elle est en réalité orchestrée par une agence de communication professionnelle, l’agence Disko. Et ces pseudo-affichages sauvages, bien plus efficaces pour toucher les jeunes que des encarts dans les magazines, sont en réalité des prestations payantes proposées par plusieurs agences à leurs clients. Il s’agirait de la dernière « tendance du street marketing », pour « une approche alternative à forte visibilité », le tout sur « des supports non réglementés ». En clair, en infraction avec la loi.
(1) La loi Évin encadre strictement toute promotion de l’alcool et du tabac.