Élisabeth Chesnais
Répartiteurs de frais de chauffageQuand le ministère interprète la réglementation
Attention, les professionnels de la mesure passent à l’offensive pour imposer les répartiteurs de frais de chauffage aux copropriétés… avec l’appui du ministère du Logement, qui interprète les textes réglementaires !
C’est du jamais vu, l’explication de texte du ministère du Logement sur l’individualisation des frais de chauffage reprise par les professionnels de la mesure est en contradiction avec le texte réglementaire sur lequel elle est censée s’appuyer.
Venant à la rescousse des professionnels de la mesure, le ministère du Logement assure en effet sur le site service-public.fr que l’individualisation des frais de chauffage peut se faire au moyen de « répartiteurs placés sur chaque radiateur » ou « d'un compteur individuel d'énergie thermique placé à l'entrée de chaque logement ».
Pour le compteur, cela va de soi, il détermine la quantité de chaleur consommée par le logement, ce qui répond très précisément au décret du 30 mai 2016.
Pour les répartiteurs, en revanche, le ministère ne colle pas au texte adopté. C’est à n’y rien comprendre, d’autant que le code de l’énergie est d’une clarté absolue : jusqu’au décret du 30 mai dernier, son article R. 241-7 disposait que « Tout immeuble collectif à usage principal d'habitation équipé d'un chauffage commun […] est muni d'appareils permettant d'individualiser les frais de chauffage collectif. Ces appareils permettent de mesurer la quantité de chaleur fournie ou une grandeur représentative de celle-ci. »
La « quantité de chaleur fournie » désignait les compteurs d’énergie thermique, et la « grandeur représentative de celle-ci » les répartiteurs, qui mesurent une température et non une quantité de chaleur fournie. C’était très clair.
Or le décret du 30 mai a modifié cet article R. 241-7 du code de l’énergie. Désormais, il stipule que « Tout immeuble collectif à usage principal d'habitation équipé d'un chauffage commun […] est muni d'appareils de mesure permettant de déterminer la quantité de chaleur fournie ». C’est tout aussi clair. Cette formulation ne désigne que les compteurs d’énergie thermique puisque le législateur a supprimé « la grandeur représentative de celle-ci », excluant ainsi les répartiteurs. « Seul un compteur permet de compter, un répartiteur répartit selon une règle puisque la sonde de ce répartiteur ne peut que mesurer un niveau de température et non une quantité de chaleur, confirme le bureau d’études thermiques Afipro. La technique est têtue ! »
Que Choisir maintient donc ses recommandations. Il est pour le moins étonnant que le site officiel service-public.fr contredise le décret du 30 mai 2016 et l’article R. 241-7 du code de l’énergie. Bien que seuls les textes réglementaires fassent autorité, une clarification de la part du ministère du Logement serait la bienvenue.