Yves Martin
Normes antipollutionRenault éclaboussé
Renault serait-il le prochain constructeur épinglé dans l’affaire des logiciels antipollution truqués après Volkswagen ? Si la Commission Royal, dont l’UFC-Que Choisir est membre, a effectivement mis à jour des anomalies, il est encore trop tôt pour se prononcer.
L’affaire Volkswagen a engendré la création d’une commission, dite Commission Royal – du nom de la ministre de l'Écologie Ségolène Royal –, à laquelle participe l’UFC-Que Choisir. Cette commission doit déterminer si des anomalies peuvent exister chez d’autres constructeurs. Renault se trouve aujourd’hui montré du doigt, et une enquête a débuté le 7 janvier avec des perquisitions de la Répression des fraudes (DGCCRF) menées sur plusieurs sites du constructeur. Le point en quelques questions-réponses.
Renault a-t-il aussi triché ?
Il est impossible de dire à ce jour s’il y a fraude ou non, l’enquête débute à peine. Une seule certitude : les mesures réalisées au sein de la Commission montrent des anomalies chez certains véhicules du constructeur français. C’est ce qui a motivé l’enquête de la DGCCRF et des perquisitions chez Renault. Pour autant, personne n’est encore en mesure de dire s’il y a eu tricherie ni même s’il y a des présomptions de fraude.
Comment agit la Commission ?
La Commission a élaboré un protocole qui permet de détecter les anomalies sur les performances alléguées, en termes d’émissions et de pollution, par les constructeurs grâce à la mise en place de leurres. Ces derniers interviennent aussi bien sur le conditionnement du véhicule que sur le cycle de vitesse ou lors du test d’homologation sur les bancs à rouleaux. Ce protocole est le premier du genre en Europe. Il permettra enfin de contrôler les informations données par les constructeurs sur les émissions de leurs véhicules. Ce protocole sera appliqué sur 100 véhicules d’ici la fin de l’année.
Le protocole permet-il de déceler un trucage ?
Concrètement, le protocole mettra en évidence des anomalies et prévoit des investigations approfondies si une incohérence est détectée. En effet, dans ce cas il faudra réaliser une expertise très poussée pour connaître les raisons de ces anomalies : s’il s’agit d’un logiciel truqueur ou d’une optimisation exagérée de la part du constructeur pour répondre au test d’homologation. Dans le premier cas, la procédure sera très complexe car il faudra entrer dans les calculateurs électroniques de la voiture pour comprendre quelle ligne de code fait quoi, à quel moment et quelles en sont les conséquences. C’est ainsi que des hackers allemands avaient réussi à identifier ce qui se passait dans les calculateurs des véhicules Volkswagen identifiés comme truqués. Cela pourra être une piste d’investigation. Sont d’ailleurs présents au sein de la Commission des instituts de recherche spécialisés tels que l’Inria (Institut national de recherche en informatique et en automatique) et l’Ineris (Institut national de l'environnement industriel et des risques).
Quel est le rôle de l’UFC-Que Choisir au sein de la Commission ?
L’UFC-Que Choisir siège au sein de la Commission pour s’assurer que le protocole appréhende toutes les mesures d’émissions et de consommation des véhicules. Mais également pour que les chiffres puissent être véritablement objectifs grâce à des tests approfondis afin de permettre l’ouverture des données au public. L’UFC entend aussi faire pression au niveau européen (lire notre communiqué) pour modifier les normes d’homologation et assurer la mise en place d’un test efficace afin de mettre fin aux écarts substantiels entre les tests en conditions réelles et en laboratoire. En effet, l’impact pour le climat et le pouvoir économique des consommateurs est en jeu. L’UFC-Que Choisir veut également que soient sanctionnées les fraudes des constructeurs qui auraient volontairement manipulé les tests par le passé. Car, en leur appliquant des sanctions, les constructeurs seraient beaucoup moins enclins à chercher à contourner la réglementation.
Frédéric Blanc