ACTUALITÉ

Faillite des centres dentaires DentexiaDes patients sur les dents

La liquidation judiciaire des centres dentaires Dentexia, implantés dans les agglomérations de Chalon, Lyon, Paris et Marseille, a plongé dans le désarroi des milliers de patients ayant avancé jusqu’à 20 000 euros de frais pour des soins inachevés, bâclés ou jamais effectués. Aujourd’hui, les patients lésés s’organisent pour obtenir réparation.

Ils sont plus de 2 203 ex-patients de Dentexia à être victimes d’une faillite qui les laisse sans dents et sans argent. Vantant à grand renfort de publicité des tarifs jusqu’à deux fois plus bas que le circuit traditionnel, ce réseau de cliniques à bas coût avait pour usage de demander à ses clients l’avance d’une partie voire de la totalité des frais dentaires pour des soins qui pouvaient tout de même atteindre 20 000 euros. Beaucoup de patients ont donc contracté des crédits sur proposition de ces centres, déclarés loi de 1901, mais adossés à des sociétés commerciales détenues par un seul et même gérant. Mise en liquidation judiciaire le 4 mars dernier, Dentexia présente une dette estimée entre 22 et 37 millions d’euros. Et cumule 4 à 5 millions d’euros de soins payés par les patients mais non exécutés.

Des patients financièrement pieds et poings liés

« Une fois les patients liés par le versement anticipé d’une partie voire de la totalité des frais, Dentexia était sûr qu’ils n’iraient pas voir ailleurs », explique Abdel Aouacheria, fondateur du « Collectif contre Dentexia » qui fédère les différents collectifs créés à Chalon, Marseille, Lyon et Paris et recense aujourd’hui 2 203 victimes. Lui-même ancien patient, il a vu ses rendez-vous s’espacer étrangement après l’encaissement de son chèque de 13 400 euros et attend depuis 3 ans la pose de prothèses sur ses piliers implantaires.

« Ces pratiques sont totalement déliées des règles déontologiques de la profession », commente Marie Vicelli, avocate de l’Ordre national des chirurgiens-dentistes (ONCD) qui a reçu à ce jour plus de 1 600 plaintes de patients de Dentexia et du centre dentaire King de Marseille (affilié à Dentexia) dont le dirigeant, Harold King, a d’ores et déjà été radié tandis qu’une de ses salariés dentistes, auditionnée fin avril, attend la décision de l'Ordre.

Dédommagement : plusieurs pistes étudiées

Pour les patients lésés qui souhaitent obtenir réparation afin de poursuivre leur parcours de soins, plusieurs pistes s’ouvrent du côté des assurances, des organismes de crédit et de l’État.

Le collectif contre Dentexia a ainsi entamé une procédure à l’amiable auprès d’Axa, assureur de Dentexia, afin d’obtenir le dédommagement des patients victimes de malfaçons, devant refaire les soins ou devant finaliser des soins entamés. Mais « cette démarche implique une expertise par un dentiste expert auprès des tribunaux dont le coût, autour de 1 000 euros, est difficilement soutenable par des personnes souvent en grande difficulté financière ».

Du côté des patients ayant contracté un emprunt, la situation semble légèrement plus favorable, puisque les deux principaux organismes impliqués (Franfinances et Cofidis) ont accepté de recalculer les emprunts sur la base des travaux dentaires réellement effectués. Mais là non plus, tout ne semble pas réglé. D’après le collectif contre Dentexia, une enquête de la Direction départementale de la protection des populations du Rhône, saisie de multiples plaintes de patients, viserait actuellement Franfinance. Motif de ces plaintes : les patients ayant souscrit un crédit auprès de l’organisme par l'intermédiaire de Dentexia ont commencé à rembourser des traites alors que les soins n'étaient pas terminés. Or les conditions de ces crédits dits « affectés » impliquent de ne rembourser l’emprunt qu’une fois les soins effectués. 

Urgence sanitaire et fonds d’exception

« Ces démarches prennent du temps, or nous sommes face à une urgence sanitaire », prévient Abdel Aouacheria, qui réclame au nom du collectif le déblocage par l’État d’un fonds d’urgence exceptionnel pour indemniser les plaignants. Une demande qui a peu de chance d’aboutir selon Christian Couzinou, président de l’Ordre national des chirurgiens-dentistes, qui estime peu probable de voir l’État s’engager à couvrir un dommage financier causé par des acteurs privés, au risque de créer une jurisprudence. Dans l’attente d’une solution concrète, la liste des patients lésés s’allonge chaque semaine.

Où sont passés les dossiers médicaux ?

Les ex-patients de Dentexia attendent toujours la restitution de leurs dossiers médicaux. 

Ils ont été récupérés sur décision judiciaire par l’Ordre national des chirurgiens-dentistes mais leur traitement demande du temps et de l’argent. Conséquence, les patients sont priés de patienter. Ce qui complique encore leur parcours de soins. Ils ont toutefois la possibilité de faire établir un certificat de situation bucco-dentaire afin de faire un état des lésions en vue de la reprise des soins. L’examen nécessaire à ce certificat est intégralement pris en charge par l’assurance maladie.

Marie-Noëlle Delaby

Marie-Noëlle Delaby

Lire aussi

Soutenez-nous, rejoignez-nous

La force d'une association tient à ses adhérents ! Aujourd'hui plus que jamais, nous comptons sur votre soutien. Nous soutenir

image nous soutenir

Newsletter

Recevez gratuitement notre newsletter hebdomadaire ! Actus, tests, enquêtes réalisés par des experts. En savoir plus

image newsletter