Assurance maladieLa réforme vue par l'UFC-Que Choisir
La demande en santé contient une forte composante de nécessité, voire de contrainte. Elle ne doit donc pas être assimilée à une demande classique de biens ou de services marchands.
La bonne santé est un état de santé à un instant t et nul n'est à l'abri d'avoir à faire un jour appel à l'assurance maladie collective. On cotise donc aussi pour soi. Cette prise de conscience du bénéfice individuel des bien portants est essentielle pour favoriser l'acceptation du principe comme du montant des prélèvements.
L'UFC-Que Choisir prend acte que le principe de solidarité et d'universalité est clairement repris par le gouvernement actuel ainsi que par l'ensemble des partenaires sociaux.
La réforme globale de l'assurance maladie est indispensable. Elle ne saurait dépendre que d'un seul instrument. Les questions de financement doivent être associées à l'organisation structurelle des soins.
Pour L'UFC-Que Choisir l'offre de soins est régie par 5 principes directeurs :
- Une offre accessible géographiquement (garantie d'une offre bien répartie) ;
- Une offre accessible économiquement (pas d'obstacle financier excluant) ;
- Une offre garantissant la qualité des soins (évaluation de tous les acteurs) ;
- Une offre assurant la continuité des soins (garantie de la permanence) ;
- Une offre cohérente et lisible par la traçabilité de toutes les étapes.
Afin d'atteindre ces objectifs, L'UFC-Que Choisir s'implique en proposant la responsabilisation de tous les acteurs, à commencer par celui qui justifie l'existence même du système de soins : l'usager.
La responsabilisation des usagers
Par la refonte des institutions dirigeantes dans lesquelles il pourrait être acteur
L'UFC-Que Choisira prouvé sa force de proposition et sa volonté de s'investir dans le système de santé en participant à l'élaboration de la loi sur les droits des patients et en étant présente à différents niveaux de décision : SROS, ARH, CA des hôpitaux, CRCI...
L'UFC-Que Choisir rappelle que dans un cadre juridique clair, c'est à la loi de définir avec précision la composition et les attributions des futures institutions. Sans cette réforme en profondeur des instances dirigeantes, l'UFC Que Choisirconsidère que toute réforme de l'Assurance Maladie est vouée à l'échec. Si cette réforme donne à notre association toute garantie de clarté dans les attributions (qui fait quoi) et la possibilité pour les usagers de peser réellement sur les décisions, l'UFC Que Choisirassumera ses responsabilités de représentant.
Par l'information
Pas de responsabilisation sans information. Le droit à l'information des usagers constitue donc l'indispensable condition à leur responsabilisation. La pertinence de l'offre n'a de sens que dès lors qu'elle est connue et clairement perçue par les usagers. L'information directe ou par services d'orientation téléphonique de l'usager constitue le premier maillon d'une utilisation adéquate des ressources du système de santé. A l'inverse, « monter en épingle » une porte d'entrée (ex. les urgences) aux dépens des autres génère des goulets d'étranglement et des crises inutiles. La création de maisons de soins assurant la permanence de l'accueil local pourrait être une idée à encourager.
Un système de soins aux portes d'entrée et aux parcours bien « balisés » :
- Sécurise usagers et professionnels ;
- En conséquence, implique l'usager et le professionnel dans le respect des procédures.
Par l'incitation aux comportements de bonne gestion de sa santé
La création au cours des premières années de vie d'un parcours incitatif de soins sur la base d'objectifs de santé publique constitue une phase de responsabilisation précoce des usagers. L'UFC-Que Choisir considère avec intérêt les approches incitatives aux dépistages et soins préventifs à l'image du modèle allemand de prise en charge totale des actes de surveillance bucco-dentaires. Toutefois, ces parcours de soins devront intégrer les exceptions découlant, à titre d'exemple, de la précarité ou des migrations récentes.
Par son implication financière
Le système actuel de participation financière n'est pas satisfaisant car non ressenti comme tel par les usagers (prélèvements et télétransmission). Avant de penser à les solliciter davantage par des moyens divers (augmentation de la CSG, reste à charge sur chaque feuille maladie ou boîte de médicaments...), il faut commencer par lui faire prendre conscience de l'ampleur des prélèvements actuels (400 euros par mois pour un salaire moyen de 1740 euros !). En tout état de cause, si de nouvelles mesures de financement devaient être mises en place, elles ne sauraient intervenir sans la mise en oeuvre simultanée des réformes de structures.
Par l'instauration de garde-fous contre le nomadisme médical
L'UFC-Que Choisir considère que la collectivité finance les soins et non le nomadisme médical, à distinguer d'un processus parfois lent de diagnostic. Mais L'UFC-Que Choisir rappelle que les surcoûts des «vrais nomades», sans explications ou justificatifs retrouvés, représentaient 1 pour mille du total des dépenses (1) et que son isolement ne saurait donc à lui seul résoudre les difficultés financières de l'assurance maladie.
Responsabilisation des autres acteurs
Par un conventionnement citoyen
Par la facilité de remboursement des soins qu'il implique, le conventionnement constitue un avantage direct que la collectivité offre à l'usager ; mais c'est aussi un avantage direct au praticien en ce sens qu'il est rarement dissociable de sa clientèle et donc de son activité et du revenu qu'elle génère. Or, dans un contexte de déséquilibre de l'offre (déserts sanitaires versus offre surabondante), L'UFC-Que Choisir considère qu'en solvabilisant la clientèle du professionnel, la collectivité est en droit d'attendre de l'avantage qu'elle offre des contreparties. Celles-ci peuvent porter sur :
- le lieu d'implantation (éventuellement en association avec des incitations) ;
- des exigences de formation initiale et continue ;
- l'appartenance à un secteur tarifaire donné ;
- une combinaison de différents critères en fonction de l'offre et de la demande locale...
L'UFC-Que Choisir propose que le conventionnement constitue l'un des instruments clef de la régulation de l'offre libérale en santé. Demandé par le professionnel, il serait accordé sur la base de la satisfaction à des critères d'intérêt général et local (déficit ou surnombre de spécialistes déjà présents dans le bassin sanitaire). A contrario, le professionnel qui renonce à tout ou partie des exigences liées au conventionnement trouve une liberté plus large : une demande non-solvabilisée par la collectivité, un risque donc plus élevé pour des revenus en conséquence, soit un retour aux sources de l'activité libérale.
Par l'évaluation et l'amélioration de la qualité du système
A l'heure actuelle, aucun acteur du système de santé (du Ministère de la Santé aux professionnels, en passant par la CNAM et les hôpitaux) ne fait l'objet d'une évaluation. Il faut remédier rapidement à cette situation qui entraîne gaspillages (deux hôpitaux voisins peuvent avoir la même activité avec 2 ou 7 spécialistes !), rentes de situation (carnet de RDV plein sur plusieurs mois), dilution des responsabilités (quel service ministériel devait alerter le Ministre de la Santé, lors de la canicule ?) et manque de transparence (que connaît-on du financement public de l'Assurance Maladie : non reversement de taxes sur l'alcool et le tabac, prélèvements pour financement des 35 heures... ?) La création d'indicateurs pourrait être une bonne chose, en sachant que tout ne peut être mesuré dans le domaine de la santé.
La qualité des soins repose sur une formation initiale et continue en adéquation avec l'évolution des techniques, des impératifs économiques et des besoins humains.
La formation continue doit donc devenir un critère d'évaluation concret du professionnel. Cette évaluation, il doit pouvoir s'en prévaloir auprès des organismes d'évaluation et d'accréditation (ANAES), comme de financement (CNAM, ARH...). Elle doit faire partie de l'équilibre du contrat avec la collectivité.
Enfin, le professionnel doit pouvoir s'en prévaloir auprès de ses patients. L'impossibilité actuelle engendre un « trou noir » dans le circuit de l'information auquel l'UFC-Que Choisirne trouve aucune justification. C'est à l'usager d'intégrer - ou non - ce critère de choix dans son mode d'élection du professionnel.
(1) Source : Faits Marquants 2003, Cnamts
ANAES : Agence Nationale d'Accréditation et d'Evaluation en Santé
ARH : Agence Régionale de l'Hospitalisation
CNAM : Caisse Nationale d'Assurance Maladie
CRCI : Commission Régionale de Conciliation et d'Indemnisation
HCAM : Haut Conseil pour l'avenir de l'Assurance Maladie
SROS : Schéma Régional d'Organisation Sanitaire